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12 mars 2009

Dadishow : Le loup dans la bergerie !

Les auditions radiotélévisées des hauts cadres guinéens qui ont pataugé dans les ressources publiques ces dernières années, révèlent des surprises agréables par la pédagogie du déballage public. Mais cette politique-spectacle étale aussi et surtout, des attitudes désagréables, tant la misérable versatilité de l’humain s’exprime chez des personnalités que l’on prenait, jusqu’à une date très récente, pour des exemples de grandeur morale et sociale

C’est un choc psychologique énorme pour le guinéen moyen ! C’est un court-circuit moral avec des effets de nausée chez le citoyen lambda, ce guinéen ordinaire qui fondait, jusqu’ici, un immense espoir et une religieuse confiance en ses dirigeants, et qui découvre subitement, que son sort n’était confié, jusque là, qu’à des usuriers, des truands et des blasphémateurs.

Il ne peut y avoir de sentiment de fierté lorsqu’on a bien suivi nos ex-dignitaires, dans leurs exploits de camouflage de la vérité, de banalisation des crimes économiques et de diversion du public, et même, du Président de la République, le volontariste capitaine Moussa Dadis Camara.

La scandaleuse sortie du nouveau ministre du Contrôle d’Etat, Alhassane Onipogui, contre l’ex ministre des Mines Ahmed Kanté, dimanche soir, est un dessin grandeur nature de cette farandole des médiocres qui nous tenait lieu de gouvernance sous le régime Lansana Conté.

Ce spectacle bouffon et gênant souligne en effet, toute cette hargne de destruction de l’autre, qui a caractérisé, des années durant, les luttes de clans et d’intérêts qui ont miné la haute Administration guinéenne. Des duels fratricides, avec ces faux-fuyants haineux et autres croc-en-jambe innommables, qui ont annihilé tous les efforts des hommes de bien et anéanti tous les projets porteurs pour ce pays.

Je dis à Dadis Camara : « Faites gaffe, mon Président, des loups sont dans la bergerie ! » 

Le combat au Camp Alpha Yaya aujourd’hui, est plus que féroce pour prendre le Chef de l’Etat en otage, au lieu de lui proposer des visions constructives pour la Guinée et les guinéens. Les rouages du CNDD et du gouvernement sont plus que jamais truffés à ce jour, de ces opportunistes rétrogrades et autres équilibristes nocifs, qui ont mis à genoux l’économie nationale et clochardisé les malheureuses populations guinéennes.

Et en bonne place sur cette liste des prédateurs invétérés et insatiables, l’actuel ministre du Contrôle d’Etat, qui joue désormais à l’expert-auditeur, en s’adjugeant allégrement, en nette position d’usurpateur de titre et de fonction, les prérogatives logiquement dévolues au Ministre des mines et de la Géologie. Surtout, lorsque le Président Dadis veut comprendre ce secteur. Pourtant... !

N’est-ce pas ce même personnage, aujourd’hui en position de justicier qui, depuis plus de cinq ans, tire toutes les ficelles occultes au Ministère des mines, pour soumettre ou chasser tous les ministres réformateurs que le destin y a conduits ?

De Alpha Mady Soumah (qui l’y intronisa) à Ahmed Kanté (qui lui retira le biberon de la bouche), en passant par les docteurs Ousmane Sylla et Ahmed Tidiane Souaré, celui qui était devenu au forceps, Inspecteur général du Ministère des Mines et de la Géologie, a, dans les archives de ce Département, des paquets de lettres de délation, qui ont successivement écourté le séjour en ce lieu, de tout chef hiérarchique qui n’aura pas accepté pas de s’embarquer dans le train de la concussion et de la compromission.

Et la cause de cet acharnement bestial, vous le savez ? L’appât du gain, et de la grosse mise, sur le fameux Fonds minier, caisse sans fonds ni comptabilité, à la dévotion des requins de ce Département.

Le Fonds minier, comme l’a si bien dit l’un de ses plus froids et plus dangereux manipulateurs, l’ex Premier Ministre Ahmed Tidiane Souaré, « c’est une régie financière liquide de 200 000 dollars US, tirée des ressources mensuelles de l’ANAIM, et destinée aux différentes dépenses au niveau du Ministère », et parfois et bien souvent, au-delà. Une manne à partager en fait, chaque mois, entre les différents chefs de service de ce Département.

L’ex inamovible Secrétaire général du Ministère, Alimou Diallo, touchait par exemple, 30 millions de francs guinéens chaque mois ! Et l’Inspecteur général, Alhassane Onipogui, actuel Ministre du Contrôle d’Etat du CNDD, se tapait tout tranquillement 18 millions par mois, soit le salaire mensuel de 30 cadres de ce Département. Gratis ! Et sans compter les énormes avantages en frais de CA, de carburant, de soins sanitaires pour la famille ou de matériels roulants. Et cela, depuis combien d’années déjà ?!!!  La liste de cette répartition-dépeçage est bien disponible, avec des noms et des destinations à vous couper l’appétit.

Pour le cas du sieur Onipogui, cette somme était destinée, dans l’argumentaire brumeux, à « l’inspection dans les sociétés minières du pays ». Combien de « sociétés » en fait ? Seulement six au total pour toute la Guinée : deux de bauxite, trois d’or et une de diamant !

A préciser que sur ces six sociétés, le Secrétaire général Alimou Diallo et l’Inspecteur général Alhassane Onipogui seraient membres du Conseil d’Administration de quatre (les aurifères et la diamantifère). Et chose curieuse : ce sont justement ces quatre sociétés qui ont la manie de présenter, à chaque fin d’exercice annuel, des bilans négatifs. Sous la « vigilance » de l’inspecteur attitré. Et cela, depuis plus de cinq ans !

Ce qui démontre éloquemment, s’il en était encore besoin, que Mr. l’Inspecteur général était payé pour ne rien inspecter. Comment se serait-il amuser d’ailleurs à le faire, dans ce « sèrè » du délit d’initiés et de l’omerta, juste associés pour tripatouiller dans les finances publiques, avec toute la désinvolture du pédant et toute l’arrogance du trafic d’influence.

Et justement, c’est dans ce capharnaüm de voracité que le Ministre Ahmed Kanté s’est retrouvé, lorsqu’il arrive dans ce Département en Avril 2007. Avec sa rigueur administrative et sa raideur de contact, il ne pouvait produire là, que des étincelles qui finiront, au fil du temps, par prendre toute l’envergure d’un tsunami.

Le temps pour lui de s’acclimater à la nouvelle atmosphère, et le voici à pas de course contre les entorses à l’orthodoxie administrative et surtout financière, en vue d’une revalorisation accélérée de nos recettes minières, desquelles dépendent en grande partie, les actions et la survie de l’Etat guinéen en général.

Aussi, ne tardera-t-il pas à serrer les bourses et à sevrer, ce faisant, les inextricables appendices d’évasions financières qui s’abreuvaient de ce cambouis. Conséquences : deux camps se forment illico :

-Les travailleurs et leurs centrales syndicales applaudissent le nouveau ministre Kanté, pour les améliorations ressenties chez eux, suite à la pression exercée sur les lignes fantaisistes des hauts cadres, et le touffu budget de souveraineté qui, soit dit en passant, s’élevait à l’époque, à la bagatelle de un milliard deux cents millions de francs guinéens.

-Les proches collaborateurs dans la haute hiérarchie, quant à eux, perçoivent tout de suite, ce ministre réformateur, comme un empêcheur de tourner en rond. Et la razzia médiatique et politico-mafieuse ne lui fera plus aucun cadeau. Jusqu’à sa chute le 27 Août 2008, soit 17 mois de bagarre et de sacrifices sans répit ni repos, pour une cure vaine des écuries d’Augias. Le rapport des forces étaient trop inégal et… malheur pour la Guinée !

Malheur pour la Guinée, parce qu’au moment où la mafia étatique prenait raison sur lui, Ahmed Kanté était sur le point de réussir ce qu’aucun ministre des mines de Guinée, disons même, aucun membre des gouvernements guinéens successifs, n’avait encore réussi, ni même imaginé : un jackpot financier et infrastructurel unique en son genre. On l’a surnommé : « Le Paquet GLOBAL » !

On croit rêver : imaginez un contrat gagnant-gagnant, « Ressources contre infrastructures », ficelé sous l’égide la Commission mixte Guinée-Chine et financé par la Banque Nationale de Chine, à hauteur de 23 milliards de dollars US, sans aucun centime exigée de la Guinée  ! Et pour quelles fins, s’il vous plaît ?

- Régler définitivement notre récurrente honte nationale de manque d’eau et d’électricité

- Construire 3600 km de voies ferrées en Guinée

- Construire 2400 km d’autoroute (dont une ligne directe Conakry-N’Zérékoré)

- Edifier et équiper 33 Ecoles Professionnelles (soit une école dans chaque préfecture)

- Edifier et équiper 3 Instituts des mines (Bauxite à Boké, Or à Kankan et fer à Beyla)

- Edifier et équiper toutes les casernes militaires du pays, avec un grand hôpital et des centres de formation pour la Défense, sans compter les autres fournitures et équipements militaires)…

Bon, excusez du peu, j’ai cité en vrac. Le document sur le Fonds Global est disponible, à l'occasion, pour ceux qui voudraient en savoir plus !

Et, malheur pour la Guinée, je dis : c’est lorsque ce montage incroyable est sur le point d’aboutir, que le ministre Ahmed Kanté est éjecté de son fauteuil ! C’est à croire que désormais, c’était la Guinée elle-même qui refusait obstinément le décollage économique !

Parce que tout simplement, ce ministre baroudeur et patriote, responsable et pragmatique, était devenu gênant pour les lobbies qui, depuis Sékou Touré jusqu’à Lansana Conté, ont fait de nos ressources minières, leurs propriétés personnelles et familiales, à travers des contrats iniques, tissés de prébendes héréditaires.

Et aujourd’hui plus qu’hier, le Chef de l’Etat est envahi et ficelé par ces mêmes individus qui ont produit ces contrats mafieux, se sont façonné ou approprié des permis porteurs, tout en inventant et en imposant une kyrielle de permis bidons, sous des labels de sociétés prête-noms de démarcheurs cupides et immoraux. Ils sont encore aujourd’hui, dans le premier cercle du CNDD au Camp Alpha Yaya.

Pour preuve : ces oiseaux maléfiques n’ont permis à aucun membre du CIRCAM (la Commission interministérielle d’experts nationaux qui a déjà élaboré un audit minutieux, clair et précis sur ce secteur stratégique), de pénétrer le CNDD, ou même, d’appartenir au Gouvernement ou à une quelconque structure de conseillers du Président Dadis. Aucun membre, je dis !!!

On engorge aujourd’hui l’alentour immédiat du capitaine Président, on racole ses proches, on soudoie ses amis, on introduit des sous-traitants rapaces auprès de lui et on entasse des tonnes de faux documents sur son bureau, avec un œil vigilant pour repérer et éloigner les meilleurs cadres patriotes, en vue de faire prospérer l’obscurité de la médiocratie et de la mafia des multinationales qui ont, depuis toujours, fait main basse sur nos ressources minières et qui s’évertue à les maintenir éternellement sequestrées et gelées, en complicité avec nos monstres nationaux.

Je dis, encore une fois, au capitaine Dadis : « Avec votre équipe actuelle de proches conseillers chargés du secteur minier, vous êtes encore loin de percevoir le chemin doré de vos nobles ambitions pour la Guinée et les guinéens. Si, en tout cas, c’est sur les mines que vous comptez, pour nous faire respirer, et surtout, avec pour seul ressort, le patriotisme désintéressé ! 

Car, et cela, tous les patriotes sincères, honnêtes et soucieux du bien-être de la Guinée, vous le confirmeront, et vous-même, vous vous en rendrez compte un jour, peut-être en retard et avec un brin de regret que : « Le loup est en plein dans la bergerie ! »

Et si un seul de ces honteux prédateurs souhaiterait s’amuser à élever, même une petite contradiction, nous arriverions daredare à vos côtés, Mr le Président, avec des dossiers qui vous feront certainement revoir, en urgence, la structure actuelle de votre Commission d’audit, et pourquoi pas, celle du gouvernement en entier ?

Là-bas dans nos villages, lorsque les sorciers ont « mangé » un bébé, on fait appelle à un mage pour dépister et châtier les fautifs. Mais s’il se trouve que c’est le mage, lui-même, qui a organisé et dirigé le supposé forfait de cannibalisme occulte… ! 

Fodé Tass Sylla

Rédacteur en Chef 

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9 mars 2009

Dadishow : Quand Ahmed Kanté pulvérise le scénario !

IMGP1074Les auditions radiotélévisées des présumés responsables du tripatouillage du tissus économique guinéen ces dernières années, ont retenu l’attention des téléspectateurs Samedi et Dimanche derniers, par les surprises agréables et désagréables que les curieux acteurs de ce feuilleton-déballage ont servi au public.

Après la série époustouflante et choquante des barons du narcotrafic, tous mouillés jusqu’au cou, en dépit des contorsions verbales et autres élucubrations gênées et gênantes pour amuser la galerie, le tour était ce weekend aux plus hauts responsables de l’Etat, ayant gérer le fiasco anthologique du Cinquantenaire de la République, le fumeux dossier de l’engraissant  « Fonds minier » et le non moins sulfureux dossier du Crédit revolving de BNP-Paribas pour la guinéenne de l’électricité, EDG.

Vendredi 6 Mars, ils étaient donc tous au Camp Alpha Yaya, devant le Président de la République et l’œil des cameras de la Radio Télévision Guinéenne, ces ex-tout-puissants de l’ère Conté : Dr Ahmed Tidiane Souaré, ci-devant Premier Ministre, Chef du gouvernement de « large ouverture », Alpha Ibrahima Kéira, Ministre-Secrétaire général de la Présidence, son prédécesseur à ce prestigieux poste : Sam Mamadi Soumah, l’Ambassadeur Directeur du Protocole d’Etat, Idrissa Thiam, son successeur, Soriba Camara « Gauchimo », l’ancien Ministre de la Communication et des Nouvelles Technologies de l’Information, porte-parole du gouvernement, Tibou Camara, les anciens ministres des Mines, Dr Ousmane Sylla et Ahmed Kanté, le Directeur général de EDG, Sanfina Diakité… Excusez du peu !

Un débat-enregistrement marathon, de 15h à 4h du matin, sans interruption ni recréation ! Une « corvée » nommée « Système Dadis » pour le grand déballage, ou tout simplement, le « Dadishow », comme l’aiment si bien les citoyens de Conakry et de cette Guinée qui peut suivre les émissions de la radio ou de la télévision nationale.

Chaudes soirées pour un show télévisé ! On aura encore entendu tellement de mots sur nos maux dans cette télé reality locale !

L’insupportable honte nationale qu’aura été l’organisation du Cinquantenaire de notre indépendance nationale était encore là, en gros plans et en filigrane, avec des dons de chefs d’Etat frères et amis, qui ont pris des chemins bizarres et louches. Les acteurs de ces forfaits sont venus nous lancer à la figure, que ces fonds étaient bel et bien arrivés à Conakry dans le cadre du cinquantenaire, mais que l’argent n’était pas destiné à cet évènement : c’étaient des dons au « président Lansana Conté », soit pour l’appuyer face aux revendications des forces armées, soit pour l’aider dans ses soins, ou encore pour la scolarité de ses enfants.

Et le défunt président aurait effectivement reçu toutes les sommes qui font objet d’incrimination aujourd’hui. Ashtakhfiroulaaaahi, eh wotan !

-        Les 500 000 dollars du gambien Yaya Djammeh ? « Ce n’était pas pour le cinquantenaire » : le Ministre Tibou Camara, accusé jusqu’ici dans ce dossier, nous a démontré, preuves à l’appui et témoins présents, qu’il « n’a même pas touché ces fonds de ses propres mains ». C’est une délégation gouvernementale gambienne qui est venue à Conakry, le remettre au Ministre Secrétaire général de la Présidence, Alpha Ibrahima Kéyra, qui déclare, la main sur le cœur, l’avoir remis au vénéré destinataire. Et pan ! Chacun est blanchi des quolibets et on tourne la page ! Même si le doute continue à planer sur une certaine serviette « scellée » et « des billets comptés ».

-        Les 500 000 000 de francs CFA du président Wade du Sénégal ? « Ce n’était pas pour le cinquantenaire » : le Ministre Mamady Sam Soumah ne l’a d’ailleurs « pas reçu des mains des sénégalais, mais bien, du président Lansana Conté », qui les lui aurait  confiés. Et, « à chaque fois qu’on avait des urgences, on puisait dedans ». Logique, non ? Puisque cet argent, c’est pour lui et lui seul. Même si le doute plane sur un Lansana Conté que l’on imagine mal, dans une position de quête auprès d’un certain Wade, qu’il abhorrait visiblement. Bon ! Comme on nous dit qu’il était si souffrant, avec tout ce que cela veut dire…

-        Les 500 000 euros du président Obiang N’Guéma de Guinée Equatoriale ? « Ce n’était pas pour le cinquantenaire » : le Directeur du Protocole d’Etat, Idrissa Thiam n’a même pas encore pu toucher le montant de ce chèque, qui est jusqu’à ce jour, en litige dans une banque privée de Bamako, la capitale malienne. « Ce fonds était destiné aux frais d’études des enfants du président Conté. » On aura même besoin dans les prochains jours, d’une signature expresse du Capitaine Moussa Dadis Camara, pour permettre la libération de cette somme par la banque malienne. Et donc, voilà le malheureux Idrissa Thiam qui reçoit « les excuses du CNDD, du gouvernement et de tout le peuple de Guinée » pour les quelques semaines de prison qu’il a enduré depuis le 11 Février au Camp Alpha Yaya. Il est libéré sur le champ et sa voiture, enlevée par des militaires, lui est rendue, en attendant « de voir pour les pertes subies à son domicile » de Nongo.

-        Le Fonds minier ? Mais dis donc : « tous les ministres qui se sont succédés dans ce Département devraient dire que ce qu’on appelle fonds minier, n’existe même pas ! » Parole d’expert minier, expert financier, ministre des Mines et Premier Ministre, Chef de gouvernement Ahmed Tidiane Souaré. « C’est un reliquat de 200 000 dollars prélevé sur les versements de l’ANAIM, que l’on domicilie quelque part, pour s’occuper en régie, des nombreux problèmes du Ministère et de ses démembrements ». Ah, bon ?

-        Quant aux 12 véhicules que la Commission d’audits lui reproche, Dr Souaré précisera qu’il s’agissait plutôt d’une soixantaine de véhicules, achetées sur un fonds d’environ 2 millions et demi de dollars sur un compte « qui dormait aux Etats Unis ». « On a équipé le Département et toutes ses structures, on a offert 12 véhicules au président Lansana Conté… Et c’est sur ce lot, que le Général m’a offert gracieusement 2 véhicules, il en a offert à d’autres, comme l’ex Premier Ministre Cellou Diallo… Si vous les réclamez aujourd’hui, Mr le Président, je suis prêt à vous déposer les clefs ». Et paf sur les nerfs sensibles ! « Mr Souaré vous êtes honnête, vous êtes patriote, vous êtes un grand homme par votre humilité, votre fidélité, votre façon d’aborder les choses… ». Mais comment !

-        Le Ministre Ahmed Kanté a bien perçu la brèche des sentiments forts, et alors, on y va ! L’intervention est un réquisitoire nationaliste et farouche : Ahmed Kanté est une victime du système Conté. A cause de ses options tranchées et intraitables face à la concussion et à la compromission. « C’est une occasion exceptionnelle, et peut-être unique de pouvoir m’exprimer devant vous, Mr le Président… J’ai subi tous les sarcasmes et enduré tous les sacrifices pour… La GUINEE et pour La GUINEE seulement ! …J’étais sur le point de conclure avec les chinois, un troc (ressources contre infrastructures) d’un montant de 23 milliards de dollars, qui aurait permis à notre pays de régler enfin ses récurrents problèmes d’eau et d’électricité, sans compter des infrastructures modernes dans toutes les garnisons militaires de la Guinée, et en un temps record, et sans que le pays ne verse même pas un centime… ».

Quoi ?! Cet exploit était donc possible ? Sans grenouillages et autres évasions financières ? Mais où était-il donc ce cadre-trésor, au moment où le CNDD composait le gouvernement ? Oh, dieu de Dieu ! Ah, merde de merde !

L’assistance approuve et Ahmed Kanté enfonce les clous. Le Président Dadis est aux anges :il l’a enfin trouvé, « son Homme ». La Chine !!! Au moment où les partenaires occidentaux battent de l’aile et se débattent dans les griffes de la récession économique. L’eau et le courant !!! En cet instant où les nouvelles autorités guinéennes veulent marquer des points chez les populations, avec la demande sociale qui risque, à tout moment, de siffler la fin de l’état de grâce.

L’ex ministre des Mines, chouchou des populations et surtout de la jeunesse, pour son intransigeance légendaire, vient ainsi de donner une nouvelle orientation au scénario de ces shows télévisés sur les audits. On est désormais loin des vertiges noires qui hantaient les présumés fautifs : le regard se tourne rageusement vers des opportunités qui enchantent.

Et alors, tous les autres dossiers empruntent cette couleur pâle de seconde zone, tant et si bien que, lorsque le Ministre du Contrôle d’Etat, ancien Inspecteur au Ministère des Mines, Alhassane Onipogui, tentera de baisser l’aura de Kanté auprès du Chef de l’Etat, il ne manquera pas de récolter des boulets courroucés, qui risquent d’ébranler dans les jours à venir, son fauteuil de ministre, en même temps que celui de son homologue des Mines. Surtout qu’il est bien connu pour avoir été de ceux-là qui ont impitoyablement combattu les reformes de Ahmed Kanté aux Mines…

Disons-le sans détours : le dadishow est bien malin ! Raide, sarcastique et un tantinet menaçant avec les narcos, il est tout autant doux et prévenant envers les coco-bouffes. C’est d’ailleurs, à y regarder de près, une occasion pour ces grilleurs d’arachide devant l’éternel, de se refaire une certaine virginité face au peuple, et se sauver ainsi des risques de revanche dans les bas quartiers. Les parents, enfants, familles et belles-familles sont, en tout cas, nettement soulagés d’un semblant de dignité retrouvée, grâce au voile médiatique étendu sur des drames économiques honteux, qui ont plongé ce pays au tréfonds de la misère.

La Justice fera son travail, on l’espère ! Ou alors… le Dieu des humbles traitera du reste. Infailliblement ! Ici ou de l’autre côté.

Fodé Tass Sylla

Rédacteur en Chef

25 février 2009

Guinée : Sale temps pour les narco !

cbe1923a86_01On peut le dire sans aucun risque de se tromper : les barons du trafic de drogue en Guinée vivent un véritable enfer, ces derniers jours. Entre interpellations et auditions radiotélévisées, les Al Capone locaux n’ont plus aucun répit ni aucun espoir de sortir de la nasse déployée par le « Système Dadis ».

«La Guinée, plaque tournante du trafic de drogue en Afrique de l’Ouest!»

Qu’est-ce que ce malheureux titre a écorché notre dignité de citoyen et de nation, ces dernières années ! On s’en était même allé à s’en faire, faute de moyens d’y faire face et surtout, d’y mettre fin. Alors, aujourd’hui, ce temps semble entrer inexorablement dans les oubliettes de l’Histoire, face à la machine de salubrité publique du CNDD.

Depuis le weekend dernier en effet, le CNDD et son Président capitaine Moussa Dadis Camara semblent avoir entrepris une véritable razzia dans le camp des narcotrafiquants en Guinée. Entre investigations, interpellations et auditions radiotélévisées, les barons de la drogue en Guinée sont astreints, chaque jour qui passe, à rendre gorge.

Il y a près d’un mois déjà, on se rappelle que ce sont 17 bandits, dont 10 militaires et 7 civils, parmi lesquels des parrains bien connus, mais jusque là intouchables, de la Camorra guinéenne, qui sont tombés dans les filets des limiers du Ministère à la Présidence chargé des Services Spéciaux, du Grand Banditisme et de la Lutte contre la Drogue.

Une action vigoureuse, saluée par toutes les populations, qui n’en pouvaient plus des affronts et du marasme tant économique que social de ces monstrueux personnages. L’immobilisation des sieurs Mamady Kallo, ci-devant capo multimilliardaire, qui avait ses entrées jusque dans les salons de la Présidence de la République, Saturnin Bangoura, inabordable jeune frère de la Première Dame de la République, Mme Henriette Conté, Charles Pascal Tolno, froid métronome de ce monde des obscurités, avec ses sept ans d’expérience en Amérique du Sud (Mexique, Colombie, Nicaragua etc…) et tant d’autres cracs relevant des forces guinéennes de Sécurité et de Défense, cette audace téméraire du CNDD laissait entrevoir, enfin, une raie d’espoir quant à la décapitation annoncée du cartel de la drogue dans notre pays.

Depuis le weekend dernier, c’est donc chose faite : les présumés tout-puissants parrains de ce réseau au niveau de la police nationale ont été, eux aussi, interpellés et mis au frais au camp Alpha Yaya Diallo, siège de la Présidence de la République et du CNDD. Il s’agit de l’ex-directeur général de la Police nationale, Sékouba Bangoura, de l’ex-directeur général de l’Office anti-drogue (OCAD), Bakary Thermite Mara, de son adjoint, Zakaria Cissé, de l’ex-directeur de la Sûreté, Mamadi Mansaré et du très célèbre ex-directeur de l’Office de répression des délits économiques et financiers (ORDEF), Victor Traoré.

Ces mastodontes maîtrisés, la croisade contre les petits requins pouvait alors bien commencer, en même temps que les auditions en séances publiques et radiotélévisées, comme l’avait promis au peuple de Guinée, le Président capitaine Moussa Dadis Camara. Et depuis hier Lundi, 23 février 2009, les guinéens ont commencé à suivre, avec beaucoup d’ahurissement, les péripéties de ces lugubres tractations qui ont permis à des fils de ce pays de plonger nos populations dans les arcanes de cet ignoble fléau de la drogue, avec ses corollaires que sont le crime organisé, les assassinats crapuleux, le vandalisme, la prostitution, la déréglementation du système financier et monétaire…

Des aveux et dénonciations d’hier soir commencent déjà à faire effet, puisque ce Mardi, des échos du Camp Alpha Yaya nous rapportent que l’un des principaux dénoncés dans ce sale dossier, le fils du président défunt, Ousmane Conté (O.C) s’est déjà rendu à la Commission au Camp Alpha Yaya. Et en même temps que lui, l’ex-tout-puissant Ministre de la Sécurité du gouvernement « de consensus », Dr Mamadou Beau Kéita !!!

Assurément, les choses commencent à se corser du côté du Camp Alpha Yaya ! Et cet exploit ne sera qu’à la décharge et à l’honneur des nouvelles autorités nationales, qui nous avaient promis, à maintes occasions, que le temps de la vérité a enfin, bien sonné dans ce pays.

En attendant, les populations guinéennes se bousculent chaque soir devant leurs écrans de télévisions, comme au bon vieux du célèbre « procès des gangs » en 1996, pour ne rien manquer de ce feuilleton aussi tragique que déshonorant, tant pour les intéressés et leurs familles que pour la Nation guinéenne, qui ne reconnaît plus ses fils, transformés par l’appât du gain facile, en loups voraces et impitoyables.

Fodé Tass Sylla

Rédacteur en Chef

23 février 2009

Radioscopie d’une Transition : Des mots et des maux !

Dadis_et_Sidya__19_Mars_2009_On est aujourd’hui, le 23 février 2009 ! En cet autre jour de labeur infini, le CNDD et son Président, le capitaine Moussa Dadis Camara, marqueront certainement d’une pierre symbolique, leur agenda : ils auront déjà passé deux bons mois à la tête de la Guinée. Ils sont arrivés le 23 Décembre, et donc, voilà soixante et deux jours bien sonnés que nous sommes ensemble. Qu’est-ce que le temps passe vite ! Je prends mon rétroviseur et j’observe.

Quoi ! Attendre les 100 jours pour faire le bilan ? Mais qu’est-ce c’est que çà ? Serais-je obligé de me calfeutrer dans un schéma immuable pour paraître à la mode, en imitant des stéréotypes figés et totalement étrangers à la marche particulière de ma Nation ?

Bon, je dis : 60 jours ! Eh oui, deux mois que le CNDD tient nos destinées en main. Des mains fermes et rassurantes, des mains martiales et rigides, des mains qui calment le bas peuple et effraient les hauts-d’en-haut : des mains justicières qui ne laissent ni répit ni repos à ceux qui, ces dernières années, ont fait de notre patrimoine public, leur propriété personnelle.

Et d’abord, soixante jours sans un seul coup de feu ! Nos oreilles n’y croient pas. Tellement elles étaient habituées, ces dernières années, au crépitement des armes. Nos villes étaient devenues de véritables Far West où les tirs directs et les balles perdues rivalisaient dans les quartiers. Avec leurs lots de victimes innocentes et de larmes impuissantes. Des bandits voraces et impitoyables, mais aussi des mutineries sans fin de nos corps en uniforme.

Il y a donc deux bons mois que cette musique lugubre s’est estompée. On dira que c’est peu, mais pour nous qui vivions ce traumatisme, ici au pays, nous ne pouvons que nous en réjouir !

Ensuite, deux mois de gestes et de mots. Des mots contre nos maux. Ah, oui ! On a commencé par entendre le capitaine Dadis Camara du CNDD, nous réveiller le 22 décembre, par des mots gaillards et tout aussi surprenants, des mots sciants au moment où nous n’avions même pas encore fini de sécher nos larmes de la nuit de deuil, avec l’annonce tardivement nocturne du décès du Président Lansana Conté.

Les mots de ce jour, nous ont fait valser invariablement entre la frayeur et l’espoir, la hantise et l’espérance, toute la journée durant, mais surtout lorsque, par l’entremise de la radio française RFI, le Premier Ministre d’alors et le Président de l’Assemblée nationale ont commencé à mettre en doute, par des mots railleurs, les mots libérateurs des officiers de notre Armée nationale.

Bon, heureusement que des mots plus railleurs du doyen Bâ Mamadou de l’UFDG sont intervenus à temps, pour nous soulager de nos maux de l’instant. Il le fallait bien, mon vieux, merci infiniment !

Le lendemain d’ailleurs, 24 Décembre, c’est la population de Conakry qui se défoulent de ses maux encaissés depuis des lustres, à travers des vivats massifs et explosifs qu’elle adresse à chaque pas à ce capitaine parfaitement inconnu et opportunément messianique, tout le long de l’artère centrale et principale de Conakry, dénommée « autoroute Fidel Castro », depuis le carrefour du Camp Alpha Yaya Diallo, refuge du CNDD, jusqu’à la presqu’île de Kaloum, soit sur 15 km d’ambiance féérique.

Les mots de ce jour, scandés à l’unisson par tout un peuple en délire, ont tôt fini par rassurer le CNDD et son Président, que la cause était enfin entendue : le pouvoir avait réellement changé de mains, cette fois ! Depuis 24 longues années, un quart de siècle, je vous dis !

Aussi, après cette parade triomphale dans la capitale, les premiers mots du capitaine Moussa Dadis Camara seront, non seulement pour remercier « ces vaillantes populations de Conakry et surtout, la jeunesse », mais aussi pour rassurer et se rassurer : « … Maintenant, je suis convaincu que je suis le Président de la République de Guinée. »

Et dans la foulée de cette victoire au forceps, une Ordonnance dont les mots ne laissent place à aucun atermoiement, renvoie illico, tous les 8 gouverneurs de région et tous les 33 préfets du pays, remplacés à la levée par des officiers de commandement régionaux et préfectoraux.

Eh, oui ! Dès la soirée, les mots des médias publics (RTG), remettent çà, en convoquant tous les membres du gouvernement déchu au Camp Alpha Yaya Diallo, devenu dès lors, le « siège des nouvelles autorités nationales ». Et le lendemain, ceux-ci ne se le feront pas dire deux fois. Avec en tête, le Premier Ministre, Chef du gouvernement « de large ouverture », Ahmed Tidiane Souaré, voilà nos intouchables « Excellences » à la queue-leu-leu et au grand complet devant la troupe et les officiers.

Et la toute première surprise viendra de là : au lieu des ces remontrances menaçantes et ces actes violents et barbares que les putschistes, sous d’autres cieux, réservent d’habitude à l’équipe vaincue, on voit un Dadis Camara qui use de mots explicatifs et apaisants, et puis, oh Dieu, l’on entend un Premier Ministre « sortant » qui fait fébrilement et courtoisement allégeance, en se mettant, lui et chacun des membres de son gouvernement « à l’entière disposition de Mr le Président de la République et du CNDD pour servir la Nation, en tant que techniciens ».

Non ! On n’en croit ni nos oreilles ni nos yeux. Et c’était vrai pourtant. La preuve : sur ordre express du tout nouveau Président, chacun de ces ex-tout-puissants, est raccompagné sous bonne escorte sécuritaire jusqu’à son domicile !!!

Le système Dadis vient de commencer et il faudra bien s’y faire : à la fois impétueux et imprévisible, sincère et tranchant, tour à tour, bon enfant et déconcertant.

Et pour ceux qui pouvaient douter de la fougueuse fermeté et de l’inaltérable résolution de ces jeunes officiers à mener leur barque sans effusion de sang, les mots d’une Ordonnance publié ce Jeudi soir, rassure que les « funérailles nationales du défunt Président de la République, le Général Lansana Conté, auront effectivement lieu, selon le programme prévu, ce Vendredi 26 Décembre 2008… ».

Un couvre-feu est instauré pour raison de sécurité, mais il ne durera que 24 heures, le temps de repérer les quelques nids d’anarchistes et les mettre hors d’état de nuire, « pour permettre à la population guinéenne de vaquer librement à ses occupations ».

Au cours de ces funérailles, célébrées devant des milliers d’invités dont 7 Chefs d’Etat de la sous-région Ouest Africaine, on retiendra que les mots ne se sont jamais départis de cette courtoisie typiquement africaine et de cette reconnaissance profondément religieuse envers les devanciers et en particulier, le défunt président.

Le jour suivant, samedi 27 Février, c’est la grand’messe de toutes les forces vives de la Nation à l’Ecole nationale Interarmes du Camp Alpha : leaders politiques, syndicaux, société civile, notables religieux etc… tous se sont massivement mobilisés ce jour de weekend, pour parler et entendre parler de la Guinée. Et les mots n’étaient pas sous les aisselles pour fustiger les maux qui nous ont rongé jusque là.

Cette première rencontre qui sentait une odeur d’ébauche de conférence nationale souveraine, a vu toutes les vues et tous les mots converger vers un seul objectif : traiter enfin nos maux dans l’unité d’action de tous les fils et de toutes les filles de ce pays.

Un blanc seing pour le CNDD ? Certainement non ! Mais déjà, chacun semblait avoir décelé le sens que prenait le vent de la nouvelle Guinée. Et ce ne seront pas les mots du Président de la Commission de la CEDEAO, Mohamed Ibn Chambas, qui viendront contredire cette option, même si dans une conférence de presse, ce Dimanche à Conakry, le mot « sanction » de principe, flotte encore dans les airs.

Ce mot qui ne présage d’ailleurs que l’alourdissement des maux de cette population déjà étranglée par le harcèlement du quotidien, ne panique nullement les nouvelles autorités guinéennes : la Communauté internationale étant suffisamment au courant du pourrissement de la situation guinéenne ces dernières années, chacun finira, un jour ou l’autre, par comprendre et lâcher du lest.

Nous, en attendant, on s’occupe de nos maux et de leurs causes. Parmi lesquelles, et en bonne place, les vieux généraux de l’armée : 22 de ces grabataires galonnés, sont d’office mis à la retraite dès ce Dimanche, 28 Décembre, dans la soirée. Et on tend l’oreille pour écouter la suite !

A partir de la deuxième semaine, Lundi 29 Décembre, le CNDD peut ainsi engager la vitesse supérieure ! Pour convaincre la Nation et nos partenaires au développement, de sa ferme volonté d’aller vite. Le Mardi, on verra alors tous les ambassadeurs accrédités en Guinée ainsi que les représentants des Institutions internationales, au grand complet, au Palais de la Colombe à Kaloum, devant le Président Dadis et son équipe. Pour des mots diplomatiques, bien sûr, mais aussi des cris du cœur : il faut convaincre nos partenaires du bien fondé de l’action. Et, à première vue, le coup semble avoir porté, à entendre du moins, certaines institutions comme la CEDEAO et la Francophonie.

Dans la soirée de ce Mardi, 30 Décembre, c’est le coup d’éclats : Kabiné Komara, en poste à Eximbank en Egypte, est nommé Premier Ministre, Chef du Gouvernement. Ce choix fait l’unanimité, en ce sens qu’il rejoint le vœu du peuple de Guinée qui avait déjà proposé ce fils du pays à ce prestigieux poste, au sortir des évènements douloureux de Janvier-Février 2007. Ainsi, tout semble bien commencer et donc, on peut continuer !

Mercredi, c’était au tour des femmes leaders du pays, ces amazones des affaires, de la politique et des forces vives, de faire le déplacement sur le Camp Alpha Yaya. Les mots du Président Dadis sur nos maux, et sur le sacrifice singulier de certaines de ces femmes combattantes, connues et reconnues par toute la Nation, comme Mme Rougui Barry, feront couler plein de larmes d’amertume et de satisfaction, ce jour là.

Ces premiers contacts pris et le Premier Ministre étant déjà à la chasse pour dépister les oiseaux rares à présenter à la Guinée comme équipe gouvernementale, le CNDD s’octroie un petit répit, tout en continuant à garnir les structures stratégiques de cadres choisis par consensus.

Jusqu’au 14 Janvier 2009, lorsque le Décret de nomination des membres du Gouvernement passe sur nos antennes. Ils sont, pour ce départ, 29 ministres comptant 10 militaires, 3 femmes, un Ministre d’Etat, un Secrétaire d’Etat et trois Secrétaires généraux. Le nombre évoluera au fil des jours et l’on enregistrera même un retentissant désistement, mais ceci est une autre histoire.

Le Lundi 19 Janvier, ce gouvernement fait son entrée solennelle chez le Chef de l’Etat au Camp Alpha Yaya. Et, à l’occasion, nous avons enfin eu droit aux mots fondateurs de la marche du CNDD dans ce processus de Transition engagée en Guinée.

C’est un discours-programme qui se saisit de tous nos maux et trouve des mots allant dans le sens de solutions à court, moyen et long termes. Il traite des audits qui devront faire la lumière sur les manquements qui ont conduit notre pays dans les abysses. Il évoque le pouvoir d’achat du travailleur et du peuple en général. Il s’attaque aux grands maux comme le banditisme, le narcotrafic, les tueries enregistrées ces dernières années, bref, il ouvre des chantiers et propose des perspectives de sortie de crise apaisée et civilisée.

Et ce sont les opérateurs économiques qui répondront les premiers à l’appel du CNDD. Le 22 Janvier, ils étaient en masse au Palais de la Colombe. Pour écouter, s’expliquer, se défendre et promettre. Comme d’habitude ! Et comme d’habitude, personne ne les croie plus. On les a souvent vus à l’œuvre dans cette rengaine creuse avec le président défunt… Le Président Dadis usera toutefois de mots rassurants pour les amener à collaborer, cette fois au moins, à l’action d’amélioration des conditions de vie des populations. Il leur demande, pour commencer, à accepter de baisser les prix des denrées de première nécessité et en particulier, le riz. On attend toujours de les voir adhérer à cet appel, et agir enfin !

Notons enfin que trois coups d’éclat ont marqué ces premiers pas du CNDD. En fait des coups médiatiques sous forme de shows télévisés, qui ont marqué à jamais l’esprit du guinéen sur le style Dadis. Un style tout de spontanéité, d’enthousiasme et de franchise :

- Le Dimanche 25 Janvier, nous avons eu droit à la confrontation directe entre le sieur Diaty Condé, ci-devant ex-directeur national du FER (Fonds d’Entretien Routier) et son Secrétaire Général du Département des Travaux Publics, Kalémodou Yansané. Ambiance !

- Le Mercredi 28, suite au limogeage du tout nouveau Secrétaire Permanent du CNDD, le Colonel Aboubacar Sidiki Camara « Idy Amine », et les rumeurs qui ont enflé le pays, nous avons suivi une séance d’explication en direct à la télé, entre le Président, le Colonel Amine et le Commandant Biro Condé du CNDD, cité dans ce feuilleton. Déconcertant !

- Et le 2 Février, dans l’axe de sa tournée dans les différentes garnisons de Défense et de Sécurité de la capitale, nous avons vu un capitaine Dadis pragmatique, remplacer la Directrice nationale des douanes, Olga Syradin, en séance publique dans la cour de ce service stratégique de l’Economie nationale. Le Secrétaire général du Ministère de la Sécurité publique, Fodé Chapeau Touré, avait déjà été nommé dans la même veine quelques instants plus tôt. Inédit !

« Woulé bara gnon ! » (le mensonge est fini). Cette phrase-slogan du Président Dadis, prononcée ce jour là, fera longtemps échos dans les quartiers populaires de Conakry et de l’arrière pays.

Des mots pour des mots, ou des mots contre nos maux ? Toujours est-il que la Guinée a déjà fini par se faire une idée claire de son nouveau Chef de l’Etat. « Il parle trop ! », clament certains. « Il crie trop ! », s’offusquent d’autres. Des réactions bien compréhensibles : elles procèdent moins des mots de Dadis que de nos maux paradigmatiques. Eh, oui ! Depuis des années que nous sommes habitués à un Chef d’Etat qui ne parle presque pas ou qui, s’il parle, n’élève même pas la voix, le ton harangueur de Dadis Camara ne peut que créer un choc psychologique. Ce ton nous épouvante et nous effraie. Question d’habitude !

Et les notables religieux qui se sont mobilisés Lundi 2 Février, pour une cérémonie de prières au Camp Alpha Yaya, ces vieux sages qui ont encore à l’oreille les envolées lyriques du Président Sékou Touré, ne seront nullement émus par les mots, encore moins le ton de Dadis Camara.

Aussi, ne trébucheront-ils pas sur les mots circonscrivant avec véhémence, nos maux et les remèdes. Leur porte-parole, Elhadj Boubacar Biro Diallo nous recommandera surtout, de ne pas aller à la précipitation, pour une transition aux acquis plombés et inaltérables.

Et alors, en dépit des agitations et autres appels du pied des forces vives de la Nation, regroupés le Lundi 9 Février au Palais du Peuple, de même que le Samedi 14 Février dans la même Salle des Congrès, le Président capitaine Moussa Dadis Camara est resté ferme en ce qu’il est de ce processus de la Transition : des fondamentaux plombés devraient être d’abord pensés, analysés et acceptés par toutes les parties, avant toutes actions populaires sur le terrain. La Guinée lucide n’est pas pressée !!!

Et il sera de la responsabilité de chaque leader de ce pays d’évaluer consciencieusement la situation, et de fondre ses options sous forme de propositions constructives, dans le moule commun.

Et c’est certainement dans une observance objective de cette volonté réaffirmée du peuple de Guinée, que la Communauté internationale qui nous observe, à travers le Groupe de Contact sur la Guinée, réuni les 16 et 17 Février à Conakry, s’est engagée à nous appuyer pour un retour civilisé à l’Ordre constitutionnel. Cette Communauté des partenaires bi et multilatéraux semble avoir entendu et enregistré tous nos mots face à nos maux, par ailleurs connus de tous, et tout semble indiquer que ce ne seront pas les remèdes qui feront défaut. Pour l’avenir de la Guinée, et de sa population si longtemps grugée et martyrisée, mais toujours debout et engagée.

Deux mois déjà que nous cherchons notre nouvelle voie, soixante deux jours que nous scrutons tous les horizons et toutes les opportunités. Puisse nos mots épouser enfin, le voile de la chasteté et de l’unité fraternelle, du positif conceptuel et du constructif inclusif pour ouvrir ce pays, cette ultime fois, au progrès universel mérité.

Fodé Tass Sylla

Rédacteur en Chef

PRG_1

10 février 2009

Dadis a dit !

Dadis a dit : « … Ce n’est ni le lieu ni l’opportunité pour les partis politiques et les syndicats pour la reprise de leurs activités qui restent suspendues, car nous sommes encore en période d’exception. »

Hier Lundi 9 Février 2009, toutes les forces vives de la nation guinéenne étaient rassemblées au Palais du Peuple à Conakry, pour discuter avec les nouvelles autorités nationales, de l’avenir immédiat du pays. Devant les leaders des partis politiques, des centrales syndicales, de la Société civile, des coordinations régionales, des notabilités religieuses de l’Islam et de l’Eglise, le Président du CNDD, Chef de l’Etat, Président de la République a répondu aux grandes préoccupations actuelles du Peuple de Guinée.

Voici le discours introductif du capitaine Moussa Dadis Camara, à cette rencontre qui avait toute l’envergure d’un début de « Conférence Nationale Souveraine », comme on en a vu dans bien d’autres pays du continent africain :

« « « « « o » » » » » »

Mesdames et Messieurs les Membres du Gouvernement,

Mesdames et Messieurs les Représentants des Forces vives de la Nation, PRG_2

Mesdames et Messieurs,

Chers compatriotes,

Si la valeur d’une Nation se reconnaît et s’exprime dans la qualité de ses citoyens, celle d’un Etat ne se reconnaîtra et ne s’exprimera que dans la qualité de ses cadres.

De ce fait, depuis l’avènement de la Transition par l’armée guinéenne, le 23 décembre 2008, un fait demeure inéluctable et intangible : il s’agit de la nécessité de reconstruire ou de qualifier notre Etat, par l’avènement des hommes d’honneurs, porteurs de valeurs.

Ne nous trompons donc pas : nous sommes à la croisée des chemins pour l’avènement d’un mieux-être, avec comme premiers acteurs, vous, les forces vives de la Nation, en accord avec les membres originels de pensée et d’action du CNDD. Voilà pourquoi, et en tout premier lieu aujourd’hui, il est opportun, louable et permis, en mon nom personnel, aux noms de mes compagnons du CNDD, de l’armée guinéenne et de toute la Nation entière, par le devoir de mémoire et pour la mémoire collective :

- Tout d’abord, de m’incliner pieusement, sur les dépouilles des victimes innocentes de ces cinquante premières années de notre existence, pour la paix de leurs âmes, en attendant de traiter toutes les frustrations par une justice réparatrice. Nos pensées vont aussi à ces victimes, issues des manifestations de janvier/février 2007. Il faut exorciser le mal par le commencement : celui de l’évocation de la mémoire car, une nation qui oublie son passé a tendance à le reproduire.

- Et ensuite, de remercier sincèrement et solennellement aussi, les vaillants acteurs, aussi bien politiques que sociaux, ayant convergé tous, vers la même destination : celle de la lutte pour l’avènement dans notre cher pays, d’une démocratie vraie.

Je tiens personnellement à rendre un hommage à ces hommes et institutions : les pères et compagnons de l’indépendance, nos aînés du 3 avril 1984, pour l’avènement de la liberté, feu Siradiou Diallo à titre posthume le doyen Bah Mamadou, Alpha Condé, Jean Marie Doré et tant d’autres, aux organisations de la société civile, les syndicats, les partis politiques. Qu’ils en soient remerciés, et que le Seigneur nous donne la force, un jour, de symboliser les valeurs qu’ils ont véhiculées ou voulu, par des récompenses, pour qu’enfin dans ce pays, soient reconnus le mérite et l’aptitude.

Chers compatriotes,

Nous sommes donc aujourd’hui réunis ici, pour parler de la vie de notre Nation, à travers le thème principal que nous appelons tous : Transition.

Nul n’ignore le profil ou les raisons profondes qui ont motivé l’armée guinéenne, à travers le CNDD, à prendre ses responsabilités pour sauver la Nation guinéenne, le 23 décembre 2008. Notre acte a été légitimé par, non seulement, le soutien populaire mais aussi, la volonté manifeste des forces vives de la Nation, pour nous accompagner à travers ce processus : celui de la Transition.

Les acteurs principaux, c'est-à-dire, vous et le CNDD, qui devez accomplir ce noble processus, aussi bien dans ses caractères symboliques que dans ceux matériels, devraient être des enfants de Guinée, porteurs de valeurs et de vertus. Pour ce faire, nous vous invitons à suivre obligatoirement un cheminement qui nous conduira du cercle vicieux vers le cercle vertueux. Il s’agira donc d’un devoir et d’un cheminement obligatoirement participatif et inclusif car, il n’appartient à aucun homme, aucun groupe, aucun appareil de se substituer à la volonté populaire.

C’est en effet aux Guinéennes et aux Guinéens, et à eux seuls, qu’il appartient de reconstruire un Etat. Ceci, en lui donnant des fondamentaux garantissant la séparation des pouvoirs, l’indépendance de la justice, la non utilisation de la région, de l’ethnie et de la religion, à des fins politiques.

Il faudrait, dès maintenant, enclencher le processus de la transition, pour bâtir les préalables d’un Etat fort, responsable et d’une Nation unie. Ainsi, seront observés d’une manière rigoureuse, le respect de tous les pluralismes existants dans la société : l’égalité entre homme et femme, la garantie et la promotion des droits de la personne humaine.

Nous sommes tous à la croisée des chemins, et le virage à prendre, pour l’arrivée de notre chère Nation vers des objectifs de valeurs et de vertus, est à la fois noble, exaltant, par moment inquiétant et dangereux, mais aussi, porteur d’espoirs. C’est pourquoi, aujourd’hui, sincèrement et solennellement, au nom du CNDD, de l’armée guinéenne toute entière, et au nom de la Guinée et des Guinéens de tous bords, je réitère et déclare notre volonté de retour à un cadre constitutionnel pour notre pays, à travers une période dite de transition.

Pour son exécution et sa mise en œuvre, je vous invite à déclencher, dans l’ordre et dans la discipline, vous les forces vives de la nation, et dans les meilleurs délais, un cadre de concertation ou de dialogue national, sous la direction du CNDD. En effet, il vous souviendra que j’avais demandé à toutes les forces vives de la Nation, et à toutes personnes de bonne volonté, de faire des propositions concrètes par écrit, de la conduite de la transition.

Je voudrais profiter de cette tribune pour remercier toutes celles et tous ceux qui ont accepté d’apporter leur contribution à la réussite de l’action salvatrice du CNDD. Ces supports seront transmis au cadre de concertation ou de dialogue nationale, pour exploitation.

Ce cadre n’est pas le lieu ni l’opportunité pour les partis et les syndicats, pour la reprise de leurs activités, qui restent suspendues car, nous sommes encore en période d’exception. L’heure est plutôt à la recherche de solutions pour une réussite de la transition. Ce cadre devrait associer toutes les couches de la Nation sans exclusive, avec cette fois-ci à la clé, l’association de la diaspora guinéenne si souvent marginalisée par nos maladresses, et pourtant, porteuse de grandes valeurs.

Mais avant l’organisation de ce cadre de concertation nationale, permettez-moi, au nom du CNDD, de vous présenter certaines de nos inquiétudes et interrogations, bien que non exhaustives, mais à prendre en compte pendant vos travaux futurs. Des réponses non partisanes, patriotiques méritent d’être apportées à ces questions :

1 - Quelles sont les motivations et les raisons qui détermineront les organes constituants de la transition ?

2 - Quels seront les termes de références de ces organes, et la nature de leurs liens ?

3 - Quels seront les critères et modalités de choix des structures, des hommes, femmes et jeunes de Guinée, ainsi que des partenaires, prêts à accompagner cette transition ?

4 - Quel sera le budget à allouer pour accompagner le fonctionnement de ces organes, ainsi que les sources de financement ?

5 - Quelles modalités les autorités militaires prévoient-elles pour une efficiente réforme de l’armée guinéenne ?

6 - Quelles modalités pour restaurer l’autorité de l’Etat, et comment renforcer la sécurité des personnes et des biens ainsi que les conditions de sécurité pour les élections ?

7 - Quelles modalités pour la révision constitutionnelle et les réformes institutionnelles ?

8 - Quelles modalités de reforme ou de refonte de certains organes de la transition déjà existants, pour une plus grande efficacité ?

9 - Quelles modalités pour des réformes économiques et le retour des grands équilibres macroéconomiques ?

10 - Quelles modalités pour résoudre toutes les frustrations et violations intervenues dans notre pays pendant ces 50 premières années, par une justice réparatrice, pour une vraie réconciliation nationale ?

11 - Quelles modalités pour renforcer l’efficacité des audits, la lutte contre le grand banditisme, l’impunité et le narcotrafic, pour déboucher sur des remboursements et l’inculpation des coupables ?

En clair, notre vision, celle du CNDD quant aux résultats de ce cadre de concertation, serait de déterminer : Où sommes-nous ? Où allons-nous ? Comment y parvenir ?

C’est en apportant des réponses à tous ces questionnements, et certes, à d’autres non énoncées maintenant, que ce cadre de concertation nationale donnera un fruit ou un outil qui sera appelé bréviaire, charte ou feuille de route de la Transition. Cet outil dégagera les organes nécessaires à la transition et qui, à leur tour, évoqueront leurs chronogrammes sectoriels pour aboutir enfin, à un chronogramme global.

Mesdames et Messieurs,

Je crois que vous mesurez l’importance des travaux qui vous attendent, et je vous invite à vous y impliquer sérieusement, afin de nous permettre de réaliser la transition dans les délais convenus. A l’issue de vos travaux, en ma qualité de Président du CNDD, je procéderai à la validation finale de vos résolutions.

Que DIEU bénisse la Guinée !

Vive la Guinée !

Vive le CNDD !

Après ce discours écrit, le Président Dadis repousse le papier, ôte ses lunettes et nous voici partis pour deux heures et demi d’horloge de débats directs avec les représentants des forces vives de la Nation. Et lorsqu’on se quittera au crépuscule, bien de points susceptibles de tension auront déjà été discutés, disputés et aplanis pour la marche consensuelle de la Guinée sur la voie de la Démocratie.

On aura surtout examiné, avec beaucoup plus de recul, les embûches liées à la précipitation et aux injonctions de maîtres de la démocratie, souvent étrangers et complètement ignorants des réalités singulières du paysage politique et social de la Guinée.

Et à la fin, il s’est révélé la nécessité de nous « presser lentement » en vue d’éviter que demain, nous soyons contraints de revenir sur nos pas pour reprendre les phases bâclées sous la pression.

Fodé Tass Sylla

Rédacteur en chef

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20 janvier 2009

Le triomphe des exceptions ?

Chef_TassAh non ! Quelque chose se passe sur cette planète de Dieu, qui m’ébouriffe ! Mais où et à qui me plaindre ? Puisque Lui, Dieu, il est là, tout près de moi, à chaque instant, mais inaccessible comme l’horizon devant le marcheur du désert.

C’est comme si la réussite suprême, c'est-à-dire, être grand milliardaire ou surtout Président de la République, dépend souvent désormais de handicaps exceptionnels, de signes négligeables qui font que la majorité ne s’y attende pas du tout, au moment où cela arrive.

Remarquez bien ce qui se passe depuis un certain temps sur l’arène internationale, surtout au niveau de la magistrature suprême des Etats :

Je peux commencer par l’évènement du jour, ce Mardi 20 Janvier 2009 : la prestation de serment de Barack Obama, l’homme aux multiples superlatifs de l’exceptionnel.

Premier président noir des Etats Unis d’Amérique, la première puissance du monde; le descendant d’un immigré kényan, l’enfant d’une blanche américaine, donc métis noir américain; l’époux d’une descendante « d’esclaves » américains, le brillant élève de l’école ségrégationniste américaine des années soixante ; l’étudiant qui se détache du lot par son intelligence exceptionnel, bref et enfin, l’homme le plus puissant de la planète à partir de ce jour. Si tout ceci n’est pas un triomphe de l’exception, il faudra bien le faire aussi !

Ce soir, cet homme d’exception, ce « handicapé » par sa couleur de peau dans une Amérique qui ne compte que 16% de noirs, passera sa première nuit à la Maison… Blanche. Lui et Michèle Obama, son épouse noire, ses deux filles noires, Malia et Sasha, ainsi que tous ses proches compagnons, parmi lesquels beaucoup de noirs. Sous les yeux d’un monde médusé et attendri, ainsi que d’une Amérique éberluée, mais compréhensive et respectueuse des règles, non d’une quelconque majorité démographique ou ethnique, mais de démocratie constitutionnelle vraie et civilisée.

Bienvenue à la Maison des Blancs, que dis-je là, à la Maison Blanche, Barraka Obaama !

Mais dis-donc, Obama, oui, je te dis dis-donc, mais comment : tu es né en 1961 ! Donc, dis-donc, Obama, ne pense pas que tu es seul dans ton cas d’exception, pour surfer ainsi sur le toit du monde ou des peuples. Suis ce qui suit, pour t’en convaincre :

Regarde la France, la Graaande Fraaance de « nos ancêtres », la France des Gaulois et des Bourbons, la France conservatrice et puriste. Regarde cette France qui, en début 2007, était placée dans un des plus grands dilemmes : choisir entre Ségolène royale, brillante intelligence, de souche française bien enracinée dans des siècles d’histoire, mais née au Sénégal, en Afrique, et « handicapée » par sa nature de femme, et un certain Nicolas Sarkozy, tout aussi brillant par les neurones, et ayant déjà fait ses preuves dans l’Administration française, mais « handicapé » par ses origines… hongroises, parce que descendant d’immigrés, même lointains, de ce pays.

Oui, choisir une femme pour diriger cette France si masochiste, c’était nettement embarrassant ! Même si, au nom d’une certaine éthique « républicaine et démocratique » ou d’une contraignante morale « d’égalité de chance entre les sexes », on s’est abstenu de le dire ou de le contester vertement.

Ou alors, élire un descendant d’immigré, au moment même où l’on clame la politique « d’immigration choisie » ou de négociations pour le renvoi des immigrés dans leurs pays d’origines.

Les français, après moult calculs, finiront par choisir le « moindre mal », en admettant à la Maison des élites, que dis-je là encore, la Maison des élus, non, l’Elysée, un nom à consonance grinçant : Nicolas Sarkozy. Si ceci n’est pas une exception, il faudra le faire aussi !

Et puis, la Pologne, ce pays des anciennes républiques de l’Est, qui s’est laissé gouverné, il n’y a pas encore longtemps, par des… jumeaux. Oui, des jumeaux : les frères Kaczynski, nés le même jour, de même père et de même mère, dont l’un était Président de la République et l’autre, Premier Ministre. Même si des dissensions de vue ont fini par pousser le frère-premier-ministre à quitter ses fonctions, ce fait exceptionnel restera inscrit dans l’Histoire de ce siècle du triomphe des exceptions, et d’une manière indélébile !

Si je commence à baisser le regard vers mon nombril, je vois le cas ghanéen. Un pays que l’on qualifie aujourd’hui de « meilleur élève des institutions financières internationales » et « champion du jeu démocratique » en Afrique. Vous rappelez-vous que ce Ghana a été mis sur les rails de la discipline sociale, de la rigueur économique et de la tolérance politique, donc du fair-play démocratique, vous rappelez-vous que tout cet exploit est venu d’un… métis et militaire : Jerry John Rawlings ?

Toujours les yeux sur le nombril, je ne peux ne pas voir mon pays, la Guinée. Remarquez ce qui vient de nous arriver : avant le décès du Président, imaginez quels pronostics, quels schémas et quels scénarii nous avons élaborés, chacun de son côté. Les partis politiques, les centrales syndicales, la Société Civile…, chacun suivait et attendait la fin de Lansana Conté avec ses espoirs et ses craintes. Les plus imaginatifs, pour ne pas dire les plus rêveurs, s’étaient déjà mis en position de dauphin constitutionnel ou naturel, tandis que d’autres affûtaient leurs armes sur des bases de suprématie démographique ou de représentativité politique « sur l’ensemble du territoire national » (sic !).

Le triomphe des exceptions, décidé en dernier ressort et en dépit de nos impuissantes volontés humaines, par le seul Maître du destin, a déjoué tous nos dessins et tous nos desseins : le nouvel homme fort de Guinée est complètement en porte-à-faux de tout ce que nous imaginions, sauf qu’il est militaire, comme le souhaitait la majorité des guinéens.

Le CNDD est nettement apolitique, ses membres ne revendiquent aucune appartenance syndicale ni à aucun groupe de pression. Ils ne sont ni de la nomenklatura militaire ou politique, ni des groupements ethniques classiques, ni des associations régionales, encore moins des lobbys économiques.

Le Président du CNDD vient de la Guinée forestière, une région qui ne s’est jamais révélée par une quelconque volonté de suprématie, ni démographique, ni financière, Dadis_et_Sidya__19_Mars_2009_ni même politique. Le Président Dadis est originaire du petit village de Koulé, à 42 km de N’Zérékoré, la capitale de la Guinée forestière.

Et –tenez-vous bien- contrairement à Sékou Touré, musulman et son épouse André Duplantier, chrétienne qui finira par adopter la religion musulmane pour finir Hadja André, contrairement à Lansana Conté, musulman et Henriette Bangoura, chrétienne qui bénéficia de la tolérance et de la compréhension de son époux pour rester à l’Eglise, le Président Dadis est un fervent chrétien, éduqué selon les préceptes de la Bible, son épouse Jeannette également, bref sa famille. Si ceci n’est pas une exception dans un pays à 85% de musulmans, il faudra bien le faire !

Et depuis le 23 Décembre dernier, les premiers pas donnant le présage, tout semble indiquer que c’est cette exception là qui risque de nous conduire vers la Guinée de nos vœux de cinquante années : l’unité des filles et fils de Guinée, le décollage économique du pays et enfin le bien-être pour chacun et tous.

On peut ne pas le croire, et surtout, ne pas le digérer, parce que allant à contre-courant de nos options ou de nos attentes, mais, curieusement, le monde à un certain niveau, semble avoir opté pour le triomphe des exceptions, et résolument tourné le dos à nos ressorts étriqués et rétrogrades que sont l’ethnie, la pureté raciale, la suprématie communautaire, le communautarisme religieux ou la dominance financière.

Et alors, ainsi vu, la sagesse, à ce niveau, ne serait-elle pas de nous faire faire un recul sur notre manière de réfléchir et de décider dans nos choix et nos options, pour ne pas rester toujours là à cogner la tête contre un mur sur lequel nous n’avons en fait, aucune prise, parce que décidé au-delà de nos limites humaines ?

Chacun de nous y gagnerait certainement mieux, en s’armant de tolérance envers les différences, de compréhension face aux imprévus de l’Histoire et de galanterie face à l’échec de nos pronostics.

Bienvenue à la Maison Blanche, à toi, Barack Obama, premier président noir de la première puissance mondiale !

Félicitations à vous tous, porteurs de « handicaps » positifs, pour votre engagement décomplexé dans l’édification de vos nations respectives !

Tolérance, compréhension et patience aux vrais et lucides patriotes de Guinée, notre Patrie !

Fodé Tass Sylla

Rédacteur en Chef

19 janvier 2009

CNDD : Faites gaffe, les gars, on vous épie !

ftassAssurément, la Guinée est belle à observer ces derniers temps. Depuis le 22 Décembre, avec le décès du Président Lansana Conté, depuis le 23 Décembre avec la prise du pouvoir par les jeunes officiers du CNDD, et surtout, depuis la publication le 14 Janvier, de la liste du nouveau gouvernement, une odeur d’échec, de malaise et de panique larvée semble flotter dans les airs.

C’est difficile à définir, mais çà se sent et çà se ressent, à quelques détours de propos intimes et de trébuchements de langage : on a la curieuse impression qu’une indicible amertume contenue, flotte sur une certaine frange de la population guinéenne. Un sentiment d’inachevé et d’insatisfaction, que l’on gère difficilement au fin fond de soi-même, pour ne pas paraître ridicule ou être vu comme naviguant à contre-courant de l’unanimité générale.

L’épreuve des nerfs est visiblement acrobatique et épuisante. Je vous parie, un contre cent, qu’elle finira bientôt par échapper au garrot moral, et à s’exprimer par des attitudes ou des mots de violence, envers tout ou rien. Le malaise est profond et sourd ! Il est cependant bien perceptible, malgré les efforts surhumains que chacun déploie dans les non-dits et les faux masques.

En effet, si chacun de nous a prié, un jour ou l’autre, par tous les dieux, pour que l’armée guinéenne se lève enfin pour nous débarrasser de l’étau du système Lansana Conté, ces derniers jours, tout commence à indiquer que chacun de nous y allait avec ses propres schémas d’après-Conté. Et l’on commence aujourd’hui à percer ces multiples faisceaux d’intérêt, surtout après la publication de la liste du nouveau gouvernement.

L’approbation quasi générale qui a accueilli Dadis et son équipe aux premières heures de leur action et dans les jours qui ont suivi, cette unanimité enthousiaste commence à se fissurer sous le choc des attentes inassouvies et des pronostics faussés.

Cas expérimental de cet effarement : certains partis politiques qui, c’était bien visible, étaient déjà profondément avancés dans la restructuration et l’infiltration épurative des différentes structures de l’Etat et de la société, dans l’attente d’une hypothétique, mais imminente irruption de leurs leaders au pouvoir. Le redéploiement massif et vindicativement sélectif du personnel administratif sur toute l’étendue du territoire national en Août dernier est nettement indicatif de ce rêve décapité : une revue détaillée des personnes aux noms génériques occupant aujourd’hui, les différents postes clés dans tous les services de l’Etat, avec une attention particulière sur les C.V et leurs rapports para-politiques avec certains partis ou leaders, pourraient révéler bien de surprises intéressantes.

Les évènements des 22 et 23 Décembre sont ainsi arrivés comme un séisme au niveau de ces pêcheurs en eaux troubles, toujours attelés, quotidiennement, à monter des scénarii inavouables pour parvenir à leurs objectifs, tout aussi abjects, parce que essentiellement orientés vers des options aussi rétrogrades que la haine de l’autre, la revanche ou la vengeance, bref, tout, sauf l’intérêt de tous les Guinéens sans exclusive. Ceux-là ont été cueillis à froid, comme un coup de fusil dans un troupeau de cynocéphales. Attendez-vous à les voir bientôt, recommencer à ronchonner, à rager et à nous prédire des lendemains de chaos général, comme ils en ont d’ailleurs l’habitude !

Quid de certaines organisations sociales ou professionnelles, qui voyaient déjà, en cette arrivée de jeunes militaires inexpérimentés au pouvoir, une autre aubaine plus juteuse et plus prometteuse que celle de l’avènement du gouvernement de consensus, issu des journées de plomb de Février 2007. Ces dernières semaines, les meneurs de ces organisations étaient laborieusement plongés dans leur habituelle logique de mise sous coupe réglée des membres du CNDD, en vue de recommencer à leurs dicter des modes d’emploi. Le boomerang de la liste du gouvernement est venu sonner le glas, en les ignorant superbement dans leur rêve gourmand. On ne sera nullement surpris de les voir bientôt, dans une levée de bouclier, autant hargneuse que désespérée !

Les anciens dignitaires du régime déchu (membres du gouvernement et d’autres institutions de la République, officiers supérieurs, parents et autres affidés, jadis influents et intouchables), confrontés subitement à un sevrage inattendu, soumis à la vindicte populaire dès qu’ils tentent de s’infiltrer au Camp Alpha Yaya pour jouer à la récupération du CNDD, et surtout, inquiets des annonces répétées d’audits et de poursuites judiciaires imminents, vivent un état de panique générale et de haine impuissante, pour les énormes privilèges perdus. Ne soyez pas surpris là aussi, à les voir lever des gourdins de médisance, d’invectives et d’injures plates dans les jours qui suivent !

Les mafieux du commerce, des sites miniers, de la pêche, de la coupe de bois, les narcotrafiquants et autres trafiquants de produits pétroliers, bref, toute cette faune que l’on nomme pompeusement « Opérateurs économiques » ou « hommes d’affaires », ont vite fait eux, de mettre profil bas. Ils se sont déjà repliés, soit à l’extérieur du pays, soit dans leurs réduits locaux, pour mieux épier les nouveaux dirigeants, en vue de déceler des failles et s’infiltrer aussi vite que possible, pour rebondir plus haut dans le tripotage immonde du tissus économique national. On lira bien entre les lignes, lorsque des réactions proviendront de telles sources intéressées, et on se baissera promptement pour laisser passer l’ouragan des irascibles bouffons du « commerce-laisse-guidons » et leurs commis aux écritures !

Le nouveau gouvernement guinéen est enfin connu, depuis ce 14 Janvier 2009. D’habitude, un tel évènement aurait fait de l’effervescence. Mais aujourd’hui, les troubadours des comités de soutien et autres soirées-dédicaces trépignent de rage, surtout après les mises en demeure du Président Dadis, quant à de tels soutiens. Ce qui grève très fortement les caisses à recettes de ces vendeurs professionnels d’éloges. Et si les paroles et autres chansons commençaient à sentir aujourd’hui même, le regret et l’amertume du bon vieux temps de Lansana Conté, il faudra bien comprendre et s’y faire : la galerie est affamée ! 

Je dis au CNDD et au gouvernement Kabiné Komara : faites gaffe, les gars ! Vous avez frappé dans trop d’intérêts à la fois ! Des petites silures aux gros requins, tous sont entrain de vous épier à la minute. A la moindre fissure, ne vous attendez à recevoir, comme cadeau, que des arêtes venimeuses, et cela, avec l’immense plaisir de ramener la Guinée à nos vieilles amours !

Fodé Tass Sylla

Rédacteur en Chef

12 janvier 2009

Guinée : les fondamentaux du changement vrai, c’est maintenant ou jamais !

RTG__Tass_et_Adji_« Des élections démocratiques, transparentes et crédibles : maintenant et avant fin 2009 ! » Tel est le slogan à la mode ces derniers jours en Guinée. Un slogan repris à gorge déployée, par les politiciens, la « société civile » et les lobbys internationaux, à toutes les occasions de parade. Mais, de grâce, avons-nous bien réfléchi avant de promouvoir cette précipitation, au moment même où, nous-mêmes, nous en appelons à « châtier » les gestionnaires indélicats qui ont grenouillé dans nos ressources et notre patrimoine commun ?

La question est embarrassante et délicate. Mais elle se pose aujourd’hui avec acuité : que veulent exactement les guinéens : une véritable rupture avec le système déchu, ou encore, le « changement dans la continuité » ?

Ah, oui ! Puisqu’il se précise de jour en jour, à travers les déclarations que nous entendons par ci par là, ou lisons sur la plupart des sites guinéens, que le « peuple de Guinée réclame le retour à la légalité constitutionnelle par l’organisation, dans un bref délai, d’élections libres, transparentes et crédibles».

Cinq questions à ce niveau :

-        De quelle élection parle-t-on : des législatives, des présidentielles ou des générales ?

-        Au nom de quel « peuple », qui nous a mandatés à cet effet, ou d’après quel sondage d’unanimité, parle-t-on ?

-        Des élections, dans quels cadres juridiques, avec quels acteurs et pour quels objectifs ?

-        Quelles missions pratiques et urgentes, donnons-nous au CNDD et au gouvernement de transition ?

-        En combien de temps doivent-ils s’acquitter de ces missions, par quelles voies et avec quels moyens matériels, juridiques, diplomatiques ou politiques ?

Chaque guinéen, chaque guinéenne, pour peu qu’il soit conscient et honnête, sait parfaitement dans quel contexte est intervenu le coup de force du 23 décembre dernier. Il serait redondant de vouloir revenir ici sur la situation de non-Etat, de non-Lois, de laisser-aller, de libertinage politique et social marqué par le pillage éhonté des ressources nationales, l’impunité, l’insécurité, et surtout, la menace d’implosion sociale entre les différentes ethnies, instrumentalisées et dopées par les discours d’exclusion des politiques et autres « intellectuels », qui se sont délibérément et hargneusement autoproclamés « défenseurs sacrés et consacrés » de leur tribu.

Chaque guinéen, chaque guinéenne, pour peu qu’il soit conscient et honnête, s’est élevé un jour ou l’autre pour, sinon dénoncer ou affronter publiquement les responsables de ces forfaits condamnables, du moins crier sa rage, parfois sous cape, tant le verrou du système était menaçant.

Nous avons passé des années à égrener nos rancœurs, mais aussi notre impuissance, face à ce rouleau compresseur qui broyait tous nos espoirs de vie décente. Nous sommes descendus plusieurs fois dans la rue, pour desserrer cet étau infernal de la médiocratie et de la kleptocratie. Résultats : des centaines de morts, autant inutiles que dramatiques, sans aucun semblant d’amélioration dans notre quotidien, ni poursuite judiciaire contre les meurtriers.

La Communauté internationale ou autres institutions qui sortent aujourd’hui les gros yeux, pour nous pousser à la précipitation, et donc, au bâclage du processus de transition, n’ont brillé à l’époque, que par leur indifférence, ou alors, des mots et larmes de crocodile, grands complices devant l’Eternel qu’elles sont, de ce système inique et impitoyable.

Or, au même moment où elle jouait à l’aveugle-sourde sur le drame guinéen, cette « Communauté internationale » s’était montrée tellement réactive et curieusement expéditive, lorsqu’il s’est agi de son île de villégiature et de loisir qu’est Anjouan, même si le déchu Mohamed Bakar a fini par « bénéficier » d’un exil « mérité » dans l’Hexagone.

La Guinée a aujourd’hui, plus que jamais, des urgences ! Des appels imminents de ses populations : d’abord les audits, des salaires décents, l’électricité, l’eau, l’assainissement du marché par la réglementation des prix, la sécurité, et puis bien après, le dépoussiérage de notre Loi Fondamentale, du code électoral, du code des partis politiques…, toutes choses indispensables à la tenue correcte et apaisée d’élections réellement libres, transparentes, et dont les résultats auront la chance d’être acceptés de toutes les parties en lice.

Et pour satisfaire à toutes ces exigences urgentissimes, nous ne trouvons pas mieux que de réduire, chaque jour, comme peau de chagrin, le temps nécessaire pour le gouvernement de transition que le Premier Ministre s’apprête à mettre en place. Le CNDD sollicite 18 mois, les partis politiques parlent d’un an (365 jours) dans leur plate-forme.

Or, chacun de nous est bien conscient que le futur gouvernement ne devra jamais ressembler à tout ce que nous avons connu jusque là. Le Premier Ministre est conscient de l’exigence impérative, pour que cette équipe soit triée sur le volet, en vue de détecter et choisir non seulement les meilleurs guinéens, professionnellement et moralement parlant, mais aussi, en tenant compte de nos syndromes d’équilibre ethnique et régional. Et cela, sous les boulets d’un harcèlement impitoyable et intéressé de divers faisceaux d’influence (nous en faisons partie, bien évidemment).

Alors question : combien de temps, pensons-nous accorder à ce gouvernement annoncé, pour composer ses différents et multiples cabinets, et là aussi, selon les mêmes critères d’efficacité, de moralité et de représentativité régionale ?

Je vois d’ici, tous les sabres que nous aiguisons déjà, chacun dans son coin, pour le frêle cou de Kabinet Komara, si jamais il ne répondait pas à nos contraignantes exigences. C’est à vous faire blanchir les cheveux, je vous dis !

Mais au fait, cette pression que nous infligeons aujourd’hui sur les membres du CNDD et le Premier Ministre (le gouvernement est toujours attendu), ces multiples démonstrations doctorales de toutes nos récitations en matière de Droit international, tiennent-elles comptent de la singularité et de la complexité de la situation concrète du pays ?

De deux choses l’une :

-        Ou ces élucubrations hâtives et parfois, courroucées, sont le fait de compatriotes qui n’ont pas une visibilité exacte des énormes tâches qui se posent à cette Guinée convalescente et profondément minée par les effluves néfastes de ces dernières années d’autodestruction,

-        Ou alors, ce tohu-bohu est expressément orchestré par d’obscurs adversaires d’un changement apaisé, et autres politiciens, pêcheurs en eau trouble, dans l’objectif non déclaré, mais bien perceptible, de faire perdre leur sérénité aux nouvelles autorités, et s’accaparer rapidement des rênes de commandement de la République, pour nous replonger dans un abject trop connu ou un incertain inconnu.

Et dans tous ces deux cas, les guinéens patriotes et sincèrement inquiets du sort de la Patrie, s’interrogent, avec ahurissement, sur le lever de bouclier que subissent, tous feux croisés, les toutes nouvelles autorités. Alors que tout –je dis bien tout- démontre que, absolument rien n’est encore en place pour remettre la Guinée sur les rails :

-        C’est dans un Etat fort que peuvent être organisées des consultations électorales maitrisées et crédibles, issues de textes de loi minutieusement et vigoureusement essartés de ces touffes rétrogrades, taillées sur mesure. La Guinée n’a pas encore cet Etat là. Loin s’en faut !

-        C’est un Etat fort qui peut imposer le respect de la liberté de mouvement et d’affaires, ainsi que la sécurité des personnes et de leurs biens. Chacun sait, sincèrement au fond de lui-même, de quoi le nôtre retourne à ce jour.

-        C’est par un gouvernement de transition patriote et engagé, que les urgents chantiers d’électricité et d’eau pourront être pensés, entrepris et exécutés, dans les délais requis et sans trop d’évasions financières. Ce gouvernement, et surtout, ses cabinets de rupture totale avec nos sales habitudes, nous les attendons encore.

-        C’est un Etat fort et un gouvernement inflexible qui peuvent s’attaquer efficacement, et avec quelques chances de réussite, à nos inextricables cavernes d’Ali Baba que sont les audits et la révision de nos mafieux contrats miniers et autres. Ils seront là quand, ces hommes intègres et désintéressés ?

En conclusion, nous sommes tous conscients de la situation juridiquement inconfortable d’une junte militaire, mais la précipitation sans les fondamentaux, ne risque-t-elle pas de remettre la Guinée dans les mains des mêmes corbeaux que nous avons tant dénoncé et fustigé, ou alors de leurs pareils, postés en véritable troisième larron de la fable ?

Toutes les réactions constructives seront les bienvenus pour nous permettre de voir plus clair dans cette atmosphère d’enthousiasme et de passions. Mais en s’engageant dans ce débat, il serait sage toutefois, d’avoir à l’esprit, les paramètres suivants :

1 – Ce qui tient lieu d’Etat en Guinée, est aujourd’hui, fortement gangrené et lamentablement affaibli, pour jouer son rôle de maintien d’ordre, sans dérapages violents et regrettables, avant, pendant et après une consultation électorale. On en sait quelque chose.

2 – La Constitution et les lois électorales, vecteurs et garants légaux d’un processus électoral normal, ont été profondément triturées ces dernières, à des fins de fraudes et de pérennité d’un système. Chacun de nous en a été témoin, impuissant peut-être, mais témoin.

3 – L’indispensable réglementation des prix sur le marché et l’amélioration du pouvoir d’achat des citoyens, ne peuvent être effective que sur le socle d’un Etat fort et organisé, capable de maîtriser le circuit des devises et de la fiscalité. On est loin d’être encore sorti des nébuleuses de l’Etat-commerçant, complice-protecteur des opérateurs économiques.

4 - Le châtiment tant attendu contre les gestionnaires indélicats de notre économie, à travers les audits, inspections et autres révisions de contrats, ne serait-il pas hypothétique dans une précipitation du processus de transition ?

Je comprends bien que les hommes politiques soient pressés de parvenir au pouvoir, d’où leurs appels croisés et pressants pour des élections immédiates. Par contre, je suis nettement ahuri que le guinéen lucide, qui connaît parfaitement bien la situation de son pays, et surtout les limites de nos politiques, puissent encore se laisser entraîner dans ce mouvement d’ensemble aux couleurs autant floues dans les intentions, qu’inquiétantes dans ses finalités.

Pour la Guinée, les fondamentaux politiques, juridiques, économiques et judiciaires, c’est maintenant ou jamais ! Au risque d’un saut hasardeux dans l’inconnu.

Adjidjatou Barry Baud

Administratrice générale guineeactu.com

9 janvier 2009

Non, la guerre de générations n’aura pas lieu, merci Papa !

tabouna« Toi étranger, toi voyageur, si tu arrives dans un village où tu ne vois aucun cheveu blanc, ramasse ta bandoulière et sauves-toi au plus vite : ce lieu n’est pas sûr ! » C’est une sagesse africaine que je prends, bien sûr, mais avec des pincettes, parce que…

Un village où l’on ne voit plus aucun vieux ni aucune vieille, ce lieu est effectivement dans tous les risques d’implosion, à la moindre étincelle entre ses habitants, tous jeunes, donc sanguins et étourdis, parce que ne pouvant s’adosser à aucun conseil d’aînés moulus par l’expérience de la vie et dépositaires de la sagesse.

Je suis bien d’accord, mais j’aurais été plus rassuré, si je trouvais ces vieux et ces vieilles, paisiblement installés dans leurs hamacs, sur les terrasses des cases ou à l’ombre de l’arbre familier, promenant leur regard calme et vigilant sur la progéniture et dispensant conseils et modes d’emploi.

Je serais encore plus à l’aise si je trouvais ces vieilles personnes sur le perron de la mosquée ou de la paroisse, égrenant le chapelet, priant pour la génération montante ou devisant sur la vie, ses merveilles, ses déboires et les limites de l’humain.

Je serais profondément touché et intimement reconnaissant à cette sagesse qui, naturellement, me servirait de socle rassurant pour la traversée de cette vie d’embûches, parce que cette sagesse-là, fruit de l’âge et creuset de l’expérience, serait toujours le ruisseau inaltérable et inépuisable dans lequel je viendrais, à chaque fois, me ressourcer pour la bataille du quotidien.

Par contre, je serai autant désarçonné et désabusé, si je rencontrais ces vieux ou vieilles, la serpette ou la daba à l’épaule, sur le sentier des champs, ou dans les prairies, entrain de labourer, s’échiner pour la pitance de la survie, s’attelant ainsi, à un rôle, naturellement et logiquement dévolu à moi, avec ma jeunesse, ma vigueur, ma hargne…

Je serai autant désarçonné que je me trouverai dans un dilemme où la logique est trahie, où toutes les règles de vie et de décence sont faussées, où la normalité est prise à l’envers, où mes croyances héritées de mon éducation africaine seraient nettement ébranlées !

Et alors, avec tout le respect et toute la reconnaissance que je leur dois, je serais amené à crier : « Non, papa, non maman, tu n’es plus à ta place ! ». 

Papa, non, toi aussi : sois gentil papa, alleeez paapppaa…, cède la place, passe-moi la passe, laisse-moi jouer ma partition, mets-moi à l’épreuve,  laisse-moi te redresser l’échine !

Toi aussi, papa ! Tu as tellement fait : tu m’as enfanté, tu m’as bordé, tu m’as bercé, tu m’as mis à l’école, tu m’as enseigné, tu m’as éduqué, tu m’as choisi un métier, tu m’as ouvert une carrière, tu m’as entrebâillé les portes de la vie active, de la vie responsable…

Toi, papa, tu es si gentil, si merveilleux, si grand, si sage ! Papa, je ne te connais pas méchant, je ne te vois pas égoïste, je refuse de te percevoir gourmand. Et le premier qui osera me dire que tu es insatiable, sois sûr, papa, il recevra mon poing sur son menton.

Papa, regarde comme tu es grand, comme tu es beau ! Mais, papa, vois aussi comment cette fichtre vie de tant de labeur, de tant de sacrifices, de tant de combats héroïques, regarde comment cette impitoyable vie a agi sur ta beauté ? Regarde ces maudits rides qui commencent à faire des sillons sur tes joues si rondes avant, tes cheveux qui tendent inexorablement vers du coton, tes épaules qui commencent à s’affaisser, à force d’avoir porté tant de poids et de responsabilités, pour la Guinée, pour l’Afrique, pour le monde.

Papa, vois-tu les photos, au mur de notre salon ? Quelle grande vie elles retracent de toi, de ton combat, de tes exploits, pour notre famille, pour notre nation, pour ton futur, c'est-à-dire aujourd’hui, mon présent, mon époque, mon temps : le temps de la relève.

Sur ces photos, papa, je te vois freluquet, les cheveux en « boby », la ceinture bien haute sur une culotte bien trop longue pour une culotte, les chaussettes en format footballeur, au dessus des genoux, et cette grosse et belle cravate qui barre le tout jusqu’à la braguette, sur une chemise trop ample à mon goût. Mais quand même papa, maman aussi, cette vieille blanchie que je chéris tant, n’était pas si mal hein, je t’assure, vieux vicieuuuux, vas !

Bon, au sérieux papa : peux-tu accepter de te reposer maintenant, pour me donner enfin la chance et l’occasion de faire, moi aussi, mes preuves au service de cette Nation, pour laquelle tu t’es tant donné, à laquelle tu as tout donné ?

Papa, tu étais de la lutte dans l’indépendance (maman n’étais pas encore née, tu me l’as dit). Tu es un héro, avec tes compagnons de tranchées, de meetings et de clandestinité (dont la plupart sont déjà dans l’au-delà, tu me l’as dit), tu as affronté ce méchant colon, tu nous as arraché de ses immondes griffes, merci papa !

Papa, tu étais au front, dans les troupes coloniales, transi par les rigueurs de l’hiver, sous des cieux aussi lointains qu’inconnus. Tu n’as jamais flanché, tu t’es envolé de victoire en victoire (tu me l’as conté), tu as bravé le feu, tutoyé la mort, le front haut, le cœur vaillant, intrépide soldat d’une cause qui était loin d’être la nôtre, qu’importe !

Dès le premier son de clairon faisant l’appel de ta Patrie, tu as sauté dans le premier bateau, pour la terre de tes ancêtres, la terre à nous, merci papa !

Papa, tu as fait tous les métiers, appris tous les enseignements, participé à tous les combats, entré dans toutes les structures de ce pays. Tu as joué tous les rôles, assumé toutes les missions. Tu as été, pêle-mêle et tout à la fois : commis, agent, secrétaire, chef, directeur, gouverneur, fédéral, ambassadeur, ministre, camarade…, et puis, excellence, sous-préfet, maire, préfet, président de CRD, et encore ministre, gouverneur, ambassadeur… et encore, et encore, et tout le temps, et toujours…

Papa, tu as eu le privilège très rare, d’avoir été aux trois grands rendez-vous de notre pays avec l’Histoire : tu étais là, le 2 Octobre 1958. Tu as assumé et savouré. Tu étais en action, le 3 Avril 1984. Tu as géré et profité. Te voici encore, rôdant au tour des hommes du 23 Décembre 2008... Ah, Dieu !

Mais, entre nous, dis-moi papa : te rends-tu compte que pendant tout ce temps, je grandis, moi aussi ? Observe-tu que tu te dépenses et tu dépenses ainsi, tout ce temps, avec cette hargne et cette abnégation si louables, pour assurer ta relève, c'est-à-dire moi ?

Mais te rends-tu compte, en même temps, que je ne peux faire mon apprentissage et assumer mes exercices de la vie pratique qu’en te succédant, c'est-à-dire, en te remplaçant, c'est-à-dire en prenant ta place ?

Acceptes-tu seulement de comprendre que ce cycle du changement et du renouvellement est une règle inévitable et contraignante de la vie ?

Non, papa, là…, je ne crois pas que cela, tu le comprennes ! Ou alors, je ne crois pas que tu veuilles l’accepter, que tu penses à t’y engager.

Or, papa, toi qui es si sage et si grand, tu aurais dû comprendre et accepter, qu’il y a toujours un temps où l’homme doit se dire : « stop, j’arrête ! » 

Oui, j’arrrrrêête ! Même si ce n’est pas par impotence ou par incapacité physique, mais pour booster la Nation en lui offrant du sang neuf, des pratiques neuves, une vision neuve.

« La sénilité est un naufrage ! », s’était écrié le Général Charles De Gaulle, dans un oui impuissant face au destin. Un oui qui sonnait cependant comme un ouf ! Le cœur ne vieillit pas. A moins d’être malade, il battra toujours à sa cadence, avec ses mêmes élans, ses mêmes volontés, ses mêmes passions. Mais, oh Dieu, cette carapace qui le porte et qu’on nomme le corps, ce squelette et ces nerfs périssables, subissent insidieusement les aléas du temps et finiront imparablement par ne plus tenir, un jour. Ploc !!!

Ne serait-il pas le temps de rentrer sagement dans sa baignoire, pour se redécouvrir attentivement devant le miroir, talocher sa poitrine par fierté pour tout ce que l’on aura déjà accompli de beau et de grand pour sa Patrie, mais aussi, frapper son égo, étrangler son égoïsme tout humain et tout naturel, s’offrir du recul et se dire : « çà suffit !!! » ?

Dis, papa, tu me comprends… ? Alleeez, sois gentil comme tu l’as toujours été, sois sage comme chacun le sait de toi, sois généreux comme nous te le connaissons : retire-toi pour savourer ton repos si mérité, prends ta place dans le hamac ancestral pour rester pour moi, pour nous, un rempart où je viendrai chaque fois m’adosser, pour repartir sur le bon pied, revigoré, ragaillardi et orienté pour d’autres étapes toujours plus ardus, encore plus exaltants et plus nobles dans le combat de la Patrie.

Alloooons, papa, cède la place, passe-moi la passe, vas-y sagement et volontairement, pour nous épargner la malédiction de t’obliger à te retirer par nos voies et moyens de jeunes, des démarches souvent regrettables.

Ces méthodes irrespectueuses et désobligeantes, j’aurais souhaité les voir appliquer à d’autres : ces insatiables étourdis qui, dans les rouages depuis cinquante ans, ont fini par se faire à l’idée que le Guinéen et toutes ses possessions sont devenus leur propriété personnelle, ces demeurés qui, ne pipant que dalle à la notion de « service public », pensent fermement que l’agent affecté sous leurs ordres est un esclave de leur grand père, ces sangsues qui s’accrochent désespérément aux titres, aux postes et aux gloires, parce que ne pouvant rien réussir d’autre dans la vie, si ce n’est l’aumône public, qu’ils ont d’ailleurs pris l’habitude de ne plus attendre qu’on leur offre, mais à se l’adjuger avec arrogance et mépris envers le propriétaire souverain de tous ces biens : le Peuple.

Epargne-moi, papa, de t’associer à cette horde de charognards qui s’évertuent toujours à dépecer ma vie, qui s’ingénient toujours à me voler ma jeunesse : c’est moi qui ai l’âge de la Guinée indépendante, moi dont l’âge tourne autour de la cinquantaine. C’est mon fils, ton petit-fils, qui a l’âge du régime du « Redressement », il est né en 1980, il a 28 ans passés. Mais quand je viens aux réunions de notre Parti, on m’appelle « jeune », et quand je rentre à la maison, mes enfants m’appelle « Doyen » en ma présence, et « le Vieux » dès que je tourne le dos.

Vois-tu, papa, que ta persistance à occuper inlassablement les postes, m’a usurpé mon statut ? Si je n’y prends garde, je resterai toujours jeune du parti, jusqu’à mes soixante ans. Trouves-tu normale une telle situation incongrue de non-situation sociale ? 

Non, papa, tu es si compréhensif, que tu nous éviteras le conflit des générations, ces absurdes affrontements qui n’arrangeront nullement notre Patrie. Au contraire !

Vas, papa, j’ai déjà dis à mes compagnons que, comme celle de Troie, la guerre de générations n’aura pas lieu en Guinée. Parce qu’elle n’a aucune raison d’être. La transition présente se voulant exempt de tout acte barbare, comme l’ont proclamé ses initiateurs, aide-nous, papa, à ne pas nous salir les mains, à ne pas nous salir face à l’Histoire.

Alleeeez, paaapa, le monde nous observe ! Et comme en 1958, quand toi et tes compagnons, vous avez montré la voie vers la dignité et la souveraineté aux autres colonies, aides-nous, en cette année charnière de notre Histoire, à montrer aux autres peuples d’Afrique et du monde, la meilleure et saine voie, une cinglante leçon de sortie civilisée de crise, pour une Nation en convalescence !

Si tu le fais, papa, si tu m’écoutes et m’accompagnes, au lieu de me distraire ou me déstabiliser dans mon élan, mes options et mes démarches, papa, tu m’auras offert le plus gros cadeau que je puisse espérer de toi, un ultime et insigne cadeau à la Guinée et à son vaillant peuple, ce peuple orphelin qui soupire, ce peuple tant martyrisé qui espère.

Fodé Tass Sylla

Rédacteur en Chef

     

7 janvier 2009

Guinée : Le crépuscule de la mamaya politique ?

« Ah, non, dis-donc Tass ! Tu ne peux pas faire semblant d’ignorer la portée socio-historique du terme « Mamaya », cette danse de nos ancêtres du grand Manden, creusetFod__Tass_Sylla de culture ancestrale et vecteur d’union ! Qu’est-ce que tu es réductif en usant de ce terme si prestigieux, dans un conteste aussi grotesque. Allez, remplace-moi çà par d’autres mots moins grinçants pour nos fibres du terroir. Tu peux prendre « folklore, parade ou saltimbanque » par exemple ! »

J’entends bien d’ici, mes frères Damaro Camara et Drahmane Touré, ou ma sœur MBalou Kébé.

Bon, je vous emprunte le mot « mamaya », juste pour parler de ce que vous savez là, et dont on a nettement ras le bol, depuis Sékou Touré jusqu’à Lansana Conté.

On commencera donc par une parenthèse, pour dire que : si « l’Afrique noire est mal partie » (René Dumont), la République de Guinée semble avoir été la plus mal lotie de tous.

Ah, bon ?! Suivons :

Un territoire de 245. 857 km2, quatre régions naturelles, avec une conjugaison harmonieuse de tous les paysages du monde (sauf celui des pôles), des monts, des montagnes, des plateaux, des vallées, des steppes sahéliennes. Des multitudes de ruisseaux, de marigots, de rivières, de fleuves…, convergeant vers tous les pays voisins de l’Afrique de l’Ouest, ou se déversant sur une façade maritime d’environ 300 km sur l’Atlantique, avec des estuaires merveilleux et des plages d’Eden. Deux saisons bien distinctes et bien dosées (la pluvieuse nourricière et la sèche qui requinque), et pour renforcer ce tableau de rêve, un sous-sol où se sont donné rendez-vous, tous les métaux précieux et substances minières dont la science et la technique sont sensées avoir besoin, dans un domaine ou l’autre, pour le grand bien de l’Humanité.

Sur ce « paradis terrestre » (Mouammar Kadhafi), moins de onze millions d’habitants, soit la population d’« un quartier de Pékin » (le Premier Ministre de Chine), ou celle du Caire, capitale de l’Egypte, qui en compte dix millions huit cents soixante mille.

Une population homogène dans sa composition (pas de race blanche, comme en Afrique du Sud), moins de 30 ethnies, tellement interpénétrées par de solides et sempiternels liens traditionnels (cohabitation ou mariage), qu’à l’observation, elles ne semblent plus former qu’une seule. Au grand dam des thuriféraires de la pureté raciale ou de l’exclusion ethnique !

Tout ceci est beau, me direz-vous, mais où se situe alors ton problème ?

Mon problème, c’est au niveau de la gestion politique et administrative de ce merveilleux pays et ses entreprenants habitants, par ses propres fils, mandatés à cet effet.

Et là, disons-le, « y a problèmes », comme le dirait mon ami Brou Amessan de la Radio Télévison Ivoirienne. Et comment ?

Rappelons-nous des années 1950 : la grande guerre vient de prendre fin (en 1945), laissant les puissances du moment, nettement languies et hagardes, incapables désormais d’assurer l’administration de colonies aussi vastes que diverses, en Afrique, en Asie et dans les Amériques.

Et voici l’habituelle hypocrisie des mots, sortir des laboratoires de l’idéologie coloniale, pour annoncer à ces « peuplades », qu’on leur « offre, gracieusement, en généreuse récompense de leur engagement dans la guerre aux côtés de la Métropole, le libre choix entre leur auto-détermination » ou l’association avec l’ancien maître, dans une « Communauté » de gestion politique et économique. L’Etat colonial sachant bien, qu’il n’a rien assuré dans ce sens, en matière de ressources humaines qualifiées pour les éventuels Etats naissants.

Le topo est alléchant, bien sûr, pour les quelques rares lettrés, de se voir très rapidement dans les honneurs dus à ces administrateurs coloniaux. Et, évidemment, ce sont les activistes politiques et sociaux, courageux interlocuteurs du « chef blanc », qui s’infiltreront dans la brèche, avec l’appui vigoureux et parfois violent, de parfaits agitateurs incultes, dopés au nationalisme radical par des slogans extrémistes. La mamaya sera l’arme qui l’emportera sur tous les autres ingrédients !

En Guinée, les centrales syndicales en général, et celles de la Poste, du Port et des Chemins de fer en particulier, deviendront, à cette époque et pour l’occasion, d’intarissables viviers pour cette marche musclée contre le colon et ses « suppôts », et ensuite, pour « la défense de la dignité et de la souveraineté nationale ».

La suite, on la connaît : renvoi sans ménagement de De Gaule et ses propositions, promulgation de la République, le 2 Octobre 1958 et puis, le face à face brutal avec l’énorme et complexe réalité de la gestion effective d’un Etat. Ah, Dieu !

Il faudra faire avec les moyens de bord, et à pas de charge ! La Métropole ayant dégarni toutes les structures d’administration et tout le socle économique. Et voici, la Guinée partie, les poches vides, le cœur vaillant et la bouche pleine de slogans !

On fait feu de tout bois, on racole de tous les horizons, de toutes les pièces, pourvu qu’elles veuillent bien déclarer la volonté de soutenir « la Cause ».

En ces débuts difficiles et risqués, on a évidemment pas le choix : on cherche à tenir coûte que coûte, et prouver aux voisins, au monde et surtout à la méchante et ingrate Métropole, que l’on pourra, contre vents et marées. La mamaya, avec les femmes de Conakry surtout, galvanisera les énergies et l’emportera sur tous les ingrédients !

Mais déjà, ce contraignant défi sera le premier hic dans l’histoire de ce pays. L’Administration qui se mettra en place, tiendra compte, non pas de la qualification intellectuelle et professionnelle, mais de la verve et de la hargne dans la défense de « la Cause ».

On y retrouvera ainsi, pêle-mêle, quelques rares vrais intellectuels, mais aussi des curricula approximatifs ou clairement ignobles, des hommes de métier ou de simples ouvriers, tous parachutés du jour au lendemain, à d’importants et complexes postes de gestion du destin de toute une République.

Et bienvenue les improvisations, les ratés, les manquements, les cafouillages, le tout couvert de slogans et de manifestations volontaristes, bref, du folklore et autres mouvements d’ensemble. Ceci s’ajoutant aux revers et autres peaux de bananes insidieusement glissées par l’ancienne Métropole, les gouvernants s’en iront très vite à la panique, et voici la porte ouverte, très tôt (dès 1961) au cafardage, à la suspicion et (oh, malheur) à l’autodestruction : le complot et les purges, comme méthode de gouvernement, ne permettront plus de s’occuper du développement du pays, qui s’en va ainsi à vau-l’eau, tandis que les bras valides et autres, professionnellement compétitifs, prennent le chemin de l’exil, au risque de leur vie et de celle de leurs familles.

Cette page sombre a fait et continue de faire l’objet de tant de passions et d’affrontements, que je préfère la laisser telle, en attendant que le temps fasse son effet vers une perception et une analyse non passionnelles.

On retiendra donc, que c’est une Guinée mal lotie et mal partie, que les militaires du CMRN prendront en charge à partir du 3 Avril 1984. La mamaya seule était bien portante, à cette époque également, avec les chœurs et autres éloges d’orchestre !

Mais là encore, le schéma des ressources humaines n’est pas aussi reluisant qu’en 1958. Les nouveaux maîtres sont tous, à quelques exceptions près, des militants en uniforme, c'est-à-dire des soldats défenseurs de l’idéologie révolutionnaire et donc, gardiens des orientations et pratiques de ceux-là qu’ils viennent remplacer.

Les principaux responsables du coup d’Etat de 1984 sortent naturellement des rangs des piliers des services de défense et de sécurité du régime de la Révolution. Ils sont également, pour la plupart, des « déserteurs » volontaires de l’armée coloniale à la proclamation de l’indépendance en 1958 et donc, on le comprendra aisément, d’un niveau de formation académique pas très solide.

Mais là encore, comme en 1958, les circonstances ne permettront pas beaucoup de discernement dans le choix des dirigeants. Les activistes ont été récompensés en 1958 pour leur action de mobilisation « des masses populaires » et de soutien indéfectible aux responsables du PDG-RDA. Les pistoléros d’Avril 1984 seront récompensés de la même manière (par des postes juteux), pour leur courage suicidaire à affronter le régime révolutionnaire, en un temps où nul n’osait, et leur engagement à soutenir les initiatives et démarches du Comité Militaire de Redressement National.

Ainsi qu’on le voit, pour ce deuxième rendez-vous avec l’Histoire, la Guinée n’avait pas, là aussi, ni le temps ni la liberté de choix des hommes qui doivent gérer ses destinées. On fera encore feu de tout bois. Surtout à partir du clash de Juillet 1985, avec la dramatique scission consécutive au coup dit « Diarra Traoré ». La mamaya viendra encore à la rescousse, pour étouffer les sourdes complaintes des victimes de ce drame national !

Et à partir de ce moment, le choix des hommes s’en ira d’ailleurs, se dégradant, influencé de plus en plus et au fil des années, par des considérations nettement en porte-à-faux avec les exigences de compétence. L’activisme politique, l’opportunisme, l’affairisme, le népotisme, le régionalisme, et surtout, l’ethnostratégie, viendront inexorablement sonner le glas de l’Administration guinéenne.

Tous ces fléaux et les dérives concomitantes ont ainsi conduit notre pays, si doté par la Nature, et son Peuple, si intelligent, si entreprenant, si courageux, mais si stoïque et si digne dans la souffrance, à vivre, depuis cinquante ans, une véritable descente aux enfers, un pèlerinage absurde et douloureux.

Aujourd’hui, la Guinée est encore à un autre carrefour de l’Histoire. Elle y gagnera si elle prend le recul pour tirer les leçons de son passé récent, en vue d’éviter, à tout prix, les écueils qui ont saccadé sa marche et remis en cause, à chaque occasion, ses nobles espoirs d’un décollage économique profitable à chacun et à chacune de ses dix millions d’âmes.

Il faudra nécessairement rompre avec les nominations par cooptation ou copinage, célébrer, non la docilité mais l’efficacité, honorer et exploiter à leur juste mesure, la compétence et la disponibilité patriotique, tuer l’ethnie pour vivifier la Nation, s’ouvrir aux autres pour profiter des acquis de l’universel.

Et tout ceci, on le peut si on le veut ! Et comme, sans nul doute, chacun de nous le veut, il est encore une chance qui s’ouvre à nous (la dernière peut-être). Taisons tout ce qui nous oppose ou nous divise, pour faire face, ensemble, au seul et noble combat qui vaille la peine d’être mené à ce jour : celui du progrès tant espéré, mais toujours renvoyé.

On pourra si, bien sûr, les nouveaux gouvernants ne flanchent pas, face aux sirènes de la mamaya, en se faisant entourer et engloutir par ces hordes de trouffions, clarinettes à la bouche et chantant les éloges de celui-ci et celui-là, nous envahissant de « mouvements de soutien », et transformant nos ministres, leurs épouses et leurs alliés, en éternels « parrains » ou « marraines » de cérémonies aussi creuses qu’inutilement et dangereusement dépensières.

Le Président Dadis a dit : « Mes compagnons du CNDD et moi, nous n’avons pas besoin de tels soutiens ! » On l’entend bien. Mais que pensent les membres de la nouvelle équipe gouvernementale que le Premier Ministre, Kabinet Komara s’apprête à mettre en place ?

Nous serons aux aguets, comme toujours, et dès le premier spot de « parrainage » ou « marrainage », nous serons fixés sur les orientations nouvelles, et nous vous tiendrons au courant avec plein d’emphase, pour que ce soit, enfin et pour toujours, le crépuscule de la mamaya politique en Guinée!

Fodé Tass Sylla

Rédacteur en Chef

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